lundi 31 octobre 2011

Hypnose (Stir of Echoes)

Film de David Koepp (1999), avec Kevin Bacon, Zachary David Cope, Kathryn Erbe, Illeana Douglas, Kevin Dunn, Conor O'Farrell, etc...

Quand on est un scénariste brillant et qu’on travaille avec des pointures, on ne sent pas forcément le besoin de passer derrière la caméra. Ni une ni deux, c’est pourtant ce qu’a fait David Koepp, à qui on devait quand même des scripts comme Carlito’s Way, Snake Eyes ou l’adaptation de Jurassic Park, ce qui n’est pas rien tout de même.  Il avait déjà signé un premier film très intéréssant, The Trigger Effect, où il disséquait les réactions extrêmes d’un groupe de banlieusards confrontés à une méga-coupure d’électricité. Pour son second, Koepp a un peu joué la sécurité en adaptant un roman de Richard Matheson, Stir of Echoes
 

Matheson, c’est l’un des meilleurs écrivains qui soient dans le domaine du fantastique, avec à son actif un authentique chef d’œuvre, Je Suis une Légende, qu’Hollywood ne s’est d’ailleurs pas privé de (mal) adapter. C’est aussi l’un des piliers de la série Twilight Zone, dont il reprendra le principe de narration (la grosse surprise à la fin) dans ses excellentes nouvelles. Hélas, le livre dont il est question ici n’est pas l’un de ses plus marquants. Il est même franchement moyen, et je dois dire que j’étais un peu perplexe de voir Koepp s’attaquer à son adaptation.
 

Et puis non, finalement. Si on ne peut pas dire que Stir of Echoes révolutionne le genre, c’est un petit thriller bien troussé, porté par un Kevin Bacon excellent. On y sent un peu trop, et c’est la grosse faiblesse du film, l’influence du Sixième Sens de Shyamalan, sorti peu de temps avant. Heureusement, le courant passe bien entre Bacon et Zachary David Cope, qui joue son fils, et cette alchimie permet au film de Koepp de se démarquer un peu. Les « séquences à faire » (visions, hallucinations…) sont bien mises en scène, et considérablement soutenues par un mixage sonore particulièrement efficace. Bref, Stir of Echoes se laisse voir sans déplaisir. D’un bouquin assez quelconque, on a su tirer un suspense bien fichu, c’est toujours ça de pris !

Omar m'a Tuer

Film de Roschdy Zem (2011), avec Sami Bouajila, Denis Podalydès, Maurice Bénichou, Salomé Stevenin, Nozha Khouadra, Ludovic Bertillot, etc...

















Un premier film, c’est toujours un peu l’épreuve du feu, a fortiori quand on est un acteur reconnu. C’est quand même assez culotté, quand on a la critique et le public avec soi, de vouloir un jour franchir le pas. En général, cette critique si bienveillante est prompte à vous attendre au coin du bois pour vous flanquer une dérouillée, et puis autant le dire : dans notre beau pays, on n’aime pas vraiment le succès, et un acteur qui veut s’improviser metteur en scène, c’est forcément suspect. Pourtant, quand un Ben Affleck aligne deux excellents films d’affilée, tout le monde applaudit. Avec Omar m’a Tuer, Roschdy Zem n’a pas choisi un sujet facile, et il livre un sans faute qui fait vraiment plaisir à voir. L’affaire Omar Raddad, avec toutes ses zones d’ombre, est un drame humain d’une formidable intensité. Zem ne trahit pas toute cette charge émotionnelle et nous montre en parallèle le calvaire de l’accusé et sa réhabilitation par un écrivain. Outre les questions qu’on peut se poser sur la tenue de l’enquête, c’est avant tout la profonde dignité d’un homme qu’on éprouve à la vision du film. La performance de Sami Bouajila est vraiment exceptionnelle, et nous fait ressentir toute la douleur et l’incompréhension qu’éprouve Raddad. Par comparaison, les séquences avec Denis Podalydès, dans le rôle de l’écrivain, peuvent paraître plus légères. Elles ont même un petit côté JFK au début, dans ce souci de révision de l’enquête initiale. On pourra argumenter qu’il s’agît là d’un cinéma quasi-descriptif, où l’auteur peut difficilement apporter sa touche personnelle. En s’effaçant derrière son sujet, Roschdy Zem ne pouvait pas mieux le servir. Au-delà du réquisitoire, Omar m’a Tuer est un film poignant mais jamais tire-larmes sur une aventure humaine bouleversante.

dimanche 30 octobre 2011

The Matrix


Film de Larry et Andy Wachowski ( 1999), avec Keanu Reeves, Laurence Fishburne, Carrie-Ann Moss, Hugo Weaving, Joe Pantoliano, etc.
 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Ca fait un peu bizarre de reparler de The Matrix aujourd’hui, maintenant que l’idée géniale du premier épisode a donné lieu à deux suites qui ont allègrement bousillé le concept. Pourtant, à la revoyure, le premier épisode de la trilogie était vraiment remarquable : une mise en scène inspirée, un univers unique, un scénario habile, et un mélange des genres assez brillamment négocié.

 
 
C'est certain, on ne peut pas dire que le film est véritablement original à 100%, car en définitive, les frères Wachowski, réalisateurs du film, ont pioché un peu partout leur inspiration : dans le courant cyberpunk, le manga, la BD… en allant jusqu’aux blockbusters bourrins style Terminator. Raconté comme ça, ça peut paraître parfaitement naze. Or, et c’est la grande force du film, toutes ces sources ont été parfaitement digérées pour créer un univers à la fois surprenant et inédit.

 
 

 
 
La grande force de The Matrix, c’est qu’il ne prend pas de gants avec le spectateur, et ne s’embarrasse pas de lui expliquer quoi que ce soit durant tout le début du film. Le public est dans le même état que Néo, le personnage principal, et ne comprend rien à ce qui lui arrive. C’est un parti-pris assez culotté, d’autant plus que les frères Wachowski ne se soucient à aucun moment de la vraisemblance et alignent tranquillement les séquences d’action les plus ébouriffantes qui soient. Visuellement, le style est clair et précis, sans les effets de caméra parkinsoniens qu’on trouve hélas dans la majorité des films d’action actuels. Bref, d’entrée de jeu, le film place la barre très haut.
 
 
 
 
 
Ensuite vient le temps des explications ou, comme le dit Morpheus, la « descente dans les tréfonds du terrier ». Le film prend alors le temps de détailler son univers et ses règles, avec la description d’une apocalypse qui a rendu les hommes esclaves des machines. Là, encore, The Matrix nous balance des images fortes, sans pour autant tout nous expliquer. La vision des champs de culture où les humains sont asservis est véritablement à glacer le sang. Le film nous détaille ensuite avec minutie l’univers de la Matrice.
 
 
 
 
 
 
Outre le fait de rattacher l’intrigue à un univers à la Philip K. Dick, dans lequel tout est factice, l’idée-clé de The Matrix, c’est d’utiliser ce cadre « virtuel » pour justifier par la suite tout ce que l’action pourra avoir de too much. Et cela devient en définitive la ligne directrice du film : faire référence à des scènes dites « classiques » (combat de kung-fu, fusillade…) et les pousser le plus loin possible, sans le moindre souci de vraisemblance. Les frères Wachowski s’appuient à fond sur les ressorts d’un cinéma à la James Cameron, mais là encore, ils savent rendre la chose visuellement intéressante et stimulante.
 
 
 
 
 
En plus de l’utilisation des câbles durant les scènes de combat (qui s’est généralisée depuis), l’autre gimmick visuel très fort de The Matrix, c’est l’utilisation du bullet-time. A mi-chemin entre la photographie et le cinéma, cet effet spécial fige la scène, pendant que la caméra continue à se déplacer autour des personnages, comme si elle se trouvait dans un environnement 3D. Un effet tellement novateur que bon nombre de films d’action l’ont récupéré à leur compte depuis. Il est, encore une fois, utilisé en totale cohérence avec l’intrigue, puisque le héros apprend peu à peu à maîtriser le temps et la vitesse.
 
 
La réalisation des frères Wachowski est originale et stylée, avec une brillante utilisation du ralenti et de l’espace. Malgré le caractère novateur de leurs effets, ils n’en abusent jamais et gèrent avec une aisance déconcertante les séquences d’action les plus échevelées. Au contraire de ce qui se fait actuellement en matière de spectacle, ils savent les doser correctement et ne pas verser dans l’excès des grosses tranches de castagne qui durent trois plombes.
 
 
cpt-2011-10-30-10h38m55s251Enfin, l’illustration musicale est particulièrement habile. En plus de l’excellente partition musicale de Don Davis, à la tonalité très contemporaine, le film utilise également des morceaux pop particulièrement bien choisis qui collent parfaitement à l’action (il est difficile de ne pas être emballé par le Spybreak du groupe Propellerheads, utilisé lors de la fusillade dans le hall). Le film tord également et allègrement le cou aux scènes « à faire » : ainsi, l’Oracle qui doit renseigner le héros sur sa destinée n’est-il que une ménagère black en train de préparer des cookies.
 
 
 
 
 
cpt-2011-10-30-12h20m20s147De la même manière, le design du film accuse un côté délabré et vieillot, qui permet au film de finalement vieillir plutôt bien. Le téléphone devient une porte d’entrée entre deux mondes, et le parallèle entre le monde réel et la Matrice est une sorte de miroir que l’on traverse telle Alice dans le conte de Lewis Carroll (auquel le film fait d’ailleurs souvent référence). Le film laisse bien entendu de côté toutes les questions philosophiques passionnantes qu’il pose sur la notion de réalité et la perception que nous en avons, mais il a au moins le mérite d’effleurer toutes ces grandes idées pour asseoir davantage tout son univers.
 
 
 
 
Il est donc d’autant plus dommage que les frères Wachowski n’aient pas su se limiter à un seul coup d’éclat et se soient crus obligés de prolonger leur film de deux suites inutiles. Des années après leur sortie, on ne garde pas grand-chose en mémoire des épisodes 2 et 3, alors que le premier tient encore magnifiquement la route. The Matrix, en dépit de ses emprunts divers et variés, possède le mérite de dépeindre un univers cohérent et original. Il est donc d’autant plus dommage que les réalisateurs, qui nous avaient déjà séduits avec Bound, n’aient pas su retrouver par la suite une telle aisance dans la mise en scène. A la fois film de S.F., fable d’anticipation, film d’action (et quelle action !), il mélange les genres avec brio et brave les étiquettes pour s’imposer malgré tout comme l’une des plus belles réussites récentes du genre et comme l’un des films les plus marquants de la décennie 2000.
 
 
 
 
 
 
 
Arrêts sur Images
 
Le Trombinoscope
The Matrix réussit aussi l’exploit de rendre Keanu Reeves à peu près crédible. Le casting du film en impose : Larry Fishburne, qu’on avait trop rarement vu depuis Apocalypse Now, est excellent en Morpheus, et la personnalité androgyne de Carrie-Ann Moss fait des merveilles dans le rôle de Trinity. On reconnaît également un fidèle des frères Wachowski, Joe Pantoliano, qui jouait déjà dans Bound, et qui assume plutôt bien le rôle du salaud de service. Enfin, dans le rôle de l’agent Smith, sorte de menace protéiforme et indestructible, Hugo Weaving parvient à camper un méchant aussi impressionnant que pouvait l’être le T-1000 dans Terminator 2.
 
 
 
Keanu Reeves
Carrie-Ann Moss
Laurence Fishburne
Hugo Weaving
Joe Pantoliano
Gloria Foster
Marcus Chong
Matt Doran
 

 
La Photographie
 
Elle est signée Bill Pope, qui a été le chef opérateur de Sam Raimi sur des films visuellement très riches, en particulier Darkman. On retrouve ici son style parfois excessif: les cadrages sont très inventifs, et résolument dans l’esprit BD du film. Toutes les scènes situées dans la Matrice ont été traitées en post-production pour afficher une dominante verte. Enfin, les séquences de ralenti sont particulièrement bien composées.
 
 
 
 
 
 
 
Bullet Time
 
Utilisé pour la première fois par le cinéaste Michel Gondry dans des clips pour Bjork ou les Stones, cet effet spécial repose sur l’utilisation d’une batterie d’appareils photo, disposée autour des acteurs et  réglée pour enregistrer en rafale et séquentiellement l’action.
 
 
 
 
 
 
La scène est alors décomposée en une suite d’images fixes, et l’informatique est utilisée pour « relier » ces images les unes aux autres en créant des transitions entre elles. La scène est enregistrée sur fond vert, et l’arrière-plan, généré par ordinateur, est ajouté ensuite. Au final, cela donne un mouvement fluide autour des personnages.
 
 
 
 
 
 
La Citation du film que personne ne connaît
(avec celle-là, vous pourrez frimer en discutant avec vos copains geeks!)
 
Sur un écran de télé en arrière-plan, on peut voir un extrait de Night of the Lepus (en français Les Rongeurs de l’Apocalypse), un nanar majuscule avec des lapins géants, que le Strapontin vous recommande tout particulièrement, et auquel les frères Wachowski semblent vouer un culte tout particulier !
 
 
 
 

vendredi 28 octobre 2011

Gainsbourg, Vie Héroïque

Film de Joann Sfar (2010), avec Eric Elmosnino, Lucy Gordon, Laetitia Casta, Doug Gordon, Mylène Jampanoï, etc..

La biographie filmée (ou biopic, en anglais dans le texte), c’est toujours un peu casse-gueule, et rares sont les vraies réussites dans le genre. Outre l’aspect anecdotique (« Ah, tiens, machin il était accro à la coke »), cinématographiquement parlant, ça n’est jamais bien extraordinaire. C’est pensé, calibré pour le grand public, et du coup, il n’y a pas beaucoup de marge pour une œuvre personnelle. Or justement, s’il y a bien un domaine dans lequel ce Gainsbourg, Vie Héroïque se démarque, c’est dans le ton très particulier de sa mise en scène. D’ailleurs, le réalisateur Joann Sfar annonce clairement la couleur : ce n’est pas « un film de … », c’est « un conte de … ». Et en effet, il ne faut pas chercher le réalisme et se laisser entraîner dans un périple en forme de rêve de gosse. C’est très déconcertant, mais finalement assez plaisant une fois qu’on a trouvé ses marques. Le seul problème, et il est de taille, c’est que, tout séduisant qu’il soit, cette rêverie n’a pas grand’chose à voir avec le personnage de Gainsbourg.

Pour les gens de la génération du Strapontin, Gainsbourg, c’était une image sulfureuse, décadente, quelqu’un qui n’hésitait pas à ruer dans les brancards et qui était complètement incontrôlable. Lorsqu’il était invité sur un plateau de télé, tout était possible, et le zapping s’en souvient encore avec des épisodes marquants comme le billet de 500 francs ou son « I want to fuck you » à Whitney Houston chez Drucker ! Outre cette provocation, Gainsbourg adorait jouer avec les interdits, c’était vraiment un artiste hardcore dans tous les sens du terme. Joann Sfar, le réalisateur, a délibérément choisi de faire abstraction de tout ce côté too much de l’artiste et son choix se respecte. Mais du coup, on ne reconnaît pas vraiment Gainsbourg dans tout ça, et tous les épisodes marquants de sa vie (Bardot, la Marseillaise…) apparaissent comme des petites vignettes plaquées sur le reste. Donc, en définitive, le bilan est très mitigé : si l’on fait abstraction du personnage (mais le peut-on vraiment ?), c’est un film très original et intéressant. Et dans le cas contraire, on n’y trouve pas assez de l’âme ni de l’aspect hors-normes de Gainsbourg. Ca donne un film entre deux chaises, indéniablement séduisant et porté par la performance d’Eric Elmosnino, mais plombé par la stature de son sujet. Dommage.

vendredi 21 octobre 2011

Un Strapontin en Concert

C'était un peu le principe du Strapontin: parler de cinéma, mais pas que... Bref, garder une petite place pour tout ce qui gravite autour, et en particulier la musique. Musique de film, bien sûr, mais pas que, là encore! On parlera donc de musique tout court. Bien entendu, le Strapontin n'étant plus tout djeune, il ne faut pas vous attendre à des chroniques sur les derniers disques sortis, mais plutôt à des trucs plus ... disons, vintage! J'inaugure donc aujourd'hui un nouveau style de rubrique qui je l'espère vous plaira. Comme de coutume, vos commentaires sont les bienvenus!

lundi 17 octobre 2011

La Couleur de l'Argent

(The Color of Money)
Film de Martin Scorsese (1986), avec Paul Newman, Tom Cruise, Mary Elizabeth Mastrantonio, Helen Shaver, John Turturro, etc.
 



















 
 
 
Je gardais un très bon souvenir de ce film, vu en salles à sa sortie en 1986. Il m’avait même plutôt réconcilié avec Scorsese qui, à l’époque, ne me faisait pas plus vibrer que ça. Je me souviens même avoir acheté la VHS et vaillamment défendu ce film, tant vilipendé par des tas d’autres. A le revoir quelques dizaines d’années après, ma foi, c’est plus vraiment la même semoule. Ca fait ça quelquefois, et on se retrouve avec des films dont on se demande ce qui a bien pu nous exalter autant quand nous les avons découverts.

Non que The Color of Money soit mauvais, non, mais avec le recul, il apparaît comme plutôt anecdotique venant d’un réalisateur de la trempe de Scorsese. Le sujet est intéressant, les acteurs sont bons, alors où c’est donc que ça cloche ? Le film se veut comme un prolongement de L’Arnaqueur, réalisé par Robert Rossen  dans les années 60. Le personnage de « Fast » Eddie Felson cherche à former une nouvelle recrue, Vincent (Tom Cruise) à l’art de l’arnaque. Le problème, c’est que tout ça patine un peu et peine à trouver sa vitesse de croisière.
 
 
 
 
 
 
 
On est admiratif devant le jeu de Paul Newman, excellent comme toujours, et Tom Cruise, dans un de ses premiers rôles, avait déjà une sacrée présence. Mais malgré ces bons atouts, on sent que l’intrigue ne progresse pas réellement. Une ou deux scènes pour bien nous faire comprendre que le jeune Vincent est une tête brulée qui n’en a rien à cirer des conseils de son mentor, et emballez, c’est pesé! Il manque de l’humour et de la distance, finalement le film finit par être aussi pontifiant que les discours de Newman sur l’âme humaine.

 
 
 
 

 
Pourtant, il y a des bonnes choses dans The Color of Money, mais elles sont plutôt à chercher sur le plan technique. Scorsese, lié par les impératifs de son sujet, fait tout pour rendre son histoire visuellement captivante, ce qui était loin d’être évident. Un film centré autour de tables de billard, c’était pas gagné. Scorsese aligne donc les travellings speedés, les gros plans sur les billes ou les visages, bref question mise en scène, cela fait quelque fois illusion (et c’est sans doute là qu’il faut chercher l’enthousiasme de jadis du Strapontin), sauf que le réalisateur a fait nettement mieux (et beaucoup plus maîtrisé) depuis.
 

 
 
 
 
Sur la fin, tout de même, The Color of Money se bonifie. Le héros découvre qu’il est devenu la victime du système qu’il croyait maîtriser. On se dit alors que le véritable film commence. Mais assez paradoxalement, Scorsese semble alors se désintéresser de l’aspect mise en scène et l'ensemble se termine en sucette. C’est bien dommage. Mais qui sait ? Comme le Strapontin, vous vous laisserez peut-être envouter par le charme tranquille du film et quelque part arnaquer par ce Scorsese malin et roublard ?

 

dimanche 16 octobre 2011

Bound

Film des frères Wachowski (1996), avec Jennifer Tilly, Gina Gershon, Joe Pantoliano, John P. Ryan, Christopher Meloni, Richard C. Sarafian, etc. 


 Avant de cartonner mondialement avec la trilogie Matrix (enfin, le premier film surtout, car les deux suivants… hem !), les frères Wachowski s’étaient fait remarquer avec Bound, un polar ma foi assez bien ficelé. A la revoyure quelques années plus tard, le film tient plutôt bien la route. Bon, c’est vrai que l’action met du temps à se mettre en place, qu’on a l’impression de ne pas très bien savoir où les réalisateurs veulent en venir. Mais une fois que l’intrigue est sur les rails, on peut dire que ça dépote ! Les frères Wachowski passent à la vitesse supérieure. L’action est violente, très sanglante même, et la mise en scène se permet quelques jolis effets, même si parfois ils sont un peu gratuits (le travelling le long du fil de téléphone). C'est sûr, l'intrigue n'est guère plus qu'une trame classique de film de mafia, et on sent que les Wachowski bothers ont voulu se démarquer du genre. C'est le seul point faible du film: en faisant des héroïnes deux lesbiennes, on sent un peu trop qu'ils ont joué la carte du sulfureux, sans pour autant que le reste suive derrière. Il ne suffit pas d'une ou deux scènes de cul pour que l'on ressente la passion qui anime les deux personnages, et on sent le film hésitant, ne sachant pas trop sur quel pied danser. Heureusement, les réalisateurs finissent par trouver leurs marques et sont beaucoup plus à l'aise dès qu'il s'agit de faire dans le polar classique. Leur mise en scène est très originale, avec une ou deux idées que n'auraient pas désavoué De Palma (ce qui explique pourquoi, au Strapontin, on est plutôt client!).

Donc au final, Bound est une très bonne surprise, et un premier film plus que prometteur. Dommage que depuis, les frères Wachowski aient un peu perdu tout ce qui faisait la singularité de leur style.

Ah oui! Juste un petit mot pour dire que le DVD (édité par M6 Vidéo) est vraiment pourrave question image. Vous me direz que quand on trouve le film à 3 euros dans une solderie, il ne faut pas s'attendre à des miracles. D'accord, mais en attendant, il y en a quand même qui ont payé le prix fort pour l'acheter à sa sortie, ce qui, vu la qualité du transfert, tient de l'arnaque pure et simple. Dommage, car le disque contient quelques bonus, dont un commentaire audio des réalisateurs.

jeudi 13 octobre 2011

Pour Elle

Film de Fred Cavayé (2008), avec Vincent Lindon, Diane Kruger, Lancelot Roch, Olivier Marchal, Liliane Rovère, Olivier Perrier, etc.
















Une bien belle surprise que ce thriller mené de main de maître par le réalisateur Fred Cavayé. Si on passe sur le postulat de départ un  peu abracadabrant (l’innocente accusée injustement), la suite fait preuve d’une belle rigueur autant dans la mise en place des péripéties que dans la justesse du jeu d’acteur. Vincent Lindon doit donc trouver un moyen de faire évader sa femme (Diane Kruger) de prison après qu’elle ait été incarcérée à tort.
Franchement, ça fait plaisir de découvrir un film français qui gère l’action avec autant d’assurance, mais aussi avec une sorte de décontraction tranquille. Le film prend le temps de poser ses personnages, et même s’il fait l’impasse sur les rapports humains pour se concentrer sur l’action, c’est toujours fait de manière très subtile, à des lieues de ce que pourrait faire un Besson. Le suspense est intelligemment mené, particulièrement sur la fin, qui fait preuve d’une belle maîtrise. Fred Cavayé, qui signait ici son premier film, confirmera tout son talent avec l’excellent A Bout Portant, mais il est clair qu’il s’agît ici d’une très belle entrée en matière. Pour Elle, ou la preuve qu’on peut faire un thriller intelligent à la française sans se vautrer dans tous les défauts du cinéma de genre. Brillant.

mercredi 12 octobre 2011

La Planète des Singes (Planet of the Apes)

Film de Franklin J. Schaffner (1967), avec Charlton Heston, Roddy Mc Dowall, Kim Hunter, Maurice Evans, Linda Harrison, etc.

















Il y a des films comme ça, dont le concept titille la curiosité, et fait peut-être même plus que la titiller. La Planète des Singes, avec ses 4 suites et son remake, a marqué définitivement le cinéma de S.F., qui pourtant à l’époque n’était pas aussi vendeur qu’aujourd’hui. Retour sur un classique inattendu.

Avant d’aller plus loin, le Strapontin se doit de mettre en garde ceux qui d’aventure n’auraient pas vu le film et n’en connaîtraient pas les surprises. Dans le cadre d’un article rétrospectif comme celui, il paraît difficile d’analyser le film sans en dévoiler les secrets. Le Strapontin invite donc ceux qui ignoreraient tout de ce classique (même si c’est difficilement concevable) de ne lire l’article qu’après avoir vu le film.

Si Planet of the Apes a autant marqué les esprits, c’est qu’il repose sur une idée inhabituelle : l’inversion des rôles, l’homme ramené au rang de bête. L’intelligence du scénario, c’est de prendre appui sur un thème de science-fiction, l’apocalypse nucléaire, pour en analyser les conséquences. L’idée principale vient du roman de Pierre Boulle, mais elle a été considérablement enrichie par les scénaristes Michael Wilson et surtout Rod Serling, le créateur de la série Twilight Zone (La Quatrième Dimension).



D’entrée de jeu, on nous demande de nous identifier avec le personnage de Taylor (Charlton Heston), qui est franchement haïssable. C’est un misanthrope qui a perdu foi dans la race humaine et qui a trouvé dans cette mission l’occasion de fuir la Terre. Il est cynique vis-à-vis de ses collègues, c’est un solitaire qui ne croit en rien. Déjà, le film innove en faisant jouer ce personnage par Charlton Heston, qui était alors spécialisé dans les personnages très « droits » et  bienveillants comme dans Les Dix Commandements ou Ben-Hur. De plus, durant son aventure, Taylor est battu, assommé, mis en cage et chassé comme un animal. Et si le film fonctionne aussi bien, c’est parce qu’il prend un malin plaisir à retourner les clichés et n’hésite pas à humilier physiquement Heston, qui était tout de même l’un des acteurs des plus physiques d’Hollywood à cette époque.





 Le film utilise très efficacement les paysages désertiques de l’Arizona pour dépeindre une planète hostile et déserte, et toutes les premières scènes rendent à merveille la sensation de désolation et d’étrangeté de la planète. Cette impression est renforcée par des idées architecturales très novatrices. Le chef décorateur William Creber a conçu des décors très inspirés du style de Gaudi, qui renforcent l’aspect primitif et sauvage.




Bien sûr, Planet of the Apes n’aurait pas atteint son statut d’œuvre culte sans l’impressionnant travail de maquillage conçu par John Chambers. Ancien prothésiste, Chambers a été le premier à utiliser le latex dans sa spécialité, et ses maquillages, même si leur expressivité est limitée par rapport à ce qui se fait aujourd’hui, restent particulièrement crédibles. Il faut d’ailleurs savoir que c’est à la suite d’un test filmé avec ces maquillages que la Fox donnera le feu vert à la mise en chantier du film.




On ne peut parler de ce film sans mentionner son réalisateur, Franklin J. Schaffner. Metteur en scène discret et efficace, Schaffner n’a jamais été reconnu à sa juste valeur par Hollywood. On lui doit pourtant l’un des films de guerre les plus passionnants qui soient, Patton, sur lequel le Strapontin ne manquera pas de revenir un jour prochain. On a toujours dénié à Schaffner un certain style, en disant que c'était un bon faiseur. Pourtant, Planet of the Apes est marqué par une vraie personnalité de réalisateur, tant les partis-pris esthétiques y sont audacieux. D’abord c’est un film d’une très grande brutalité, que ce soit dans l’action ou dans la mise en scène. Ensuite, il y a une véritable maîtrise de la réalisation dans des moments d’anthologie comme la séquence de la chasse. Enfin, Schaffner sait parfaitement gérer tout ce qui relève de la critique sociale sans que jamais le film ne devienne ridicule ou trop démonstratif. Planet of the Apes porte la marque d’un réalisateur qui sait s’effacer derrière son sujet, mais fait preuve de suffisamment de talent pour faire de son film davantage qu’une œuvre de série.



Enfin, il serait injuste de parler de Planet of the Apes sans mentionner l’extraordinaire partition musicale de Jerry Goldsmith, à la fois cahotique, atonale et d’une richesse instrumentale incroyable. Extrêmement novatrice, la musique renforce le caractère barbare et l’atmosphère violente du film.





Les dernières images du film sont restées dans toutes les mémoires. On sent dans cette surprise finale l’influence de Rod Serling, dont les épisodes de Twilight Zone se terminaient ainsi sur un retournement de situation stupéfiant, qui obligeait le spectateur a reconsidérer tout ce qu’il venait de voir. L’intelligence du film, c’est d’avoir sû lui associer un symbole visuel très fort, la Statue de la Liberté. La mise en scène est aussi particulièrement subtile, ne dévoilant que des fragments du monument au spectateur alors que Taylor a déjà compris le terrible secret. Il maudit la race humaine lors d'un monologue déchirant que Charlton Heston surjoue comme à plaisir: "Nous étions revenus sur la Terre! Cette planète de cauchemar, c'est la Terre! Ils les ont fait sauter, leurs bombes... Je vous hais! Soyez maudits jusqu'à la fin des siècles!". La toute dernière image nous révèle simplement les décombres de la statue, sans le moindre effet superflu ni musique.




Planet of the Apes gère avec beaucoup d’intelligence cette idée d’ « évolution à l’envers », qui aurait ramené l’être humain à l’état sauvage tandis que les singes prenaient sa place à la suite d'un cataclysme nucléaire. Cela replace le film dans le courant du cinéma des années 60, où s’exprimait la peur de la bombe. En même temps, malgré son absence d’effets spéciaux, il a contribué à sensibiliser le grand public au film de genre. On peut même dire qu’il a préparé le terrain pour 2001, qui arrivera un an plus tard.


Un mot rapide tout de même sur les suites, qui ont tenté d’exploiter le filon au mieux. Si le deuxième épisode est plutôt dispensable, le troisième, Les Evadés de la Planète des Singes propose un développement intéressant, ramenant les singes à notre époque et amorçant du même coup le déclin de l’homme. Les volets 4 et 5 racontent le soulèvement des singes, mais il a hélas manqué à tous ces films un véritable metteur en scène, qui se serait impliqué autant que Schaffner l’avait fait dans le premier épisode. Passons enfin sur le remake inutile de Tim Burton, sans âme ni passion, en dépit des formidables progrès techniques effectués au niveau des maquillages.


Planet of the Apes reste donc un film unique en son genre, le premier à avoir fait entrer la science-fiction de plain pied dans l’âge adulte, un classique dans le vrai sens du terme. A la fois sauvage, drôle, incongru, brutal, le film ose brillamment le mélange des genres. Charlton Heston y trouve un de ses meilleurs rôles et même après des années, on reste toujours sous le charme de cette fable novatrice et diablement intelligente. Géant.

Le Casting :
Difficile mission pour le trombi, puisque la plupart des acteurs sont ici grimés. Mais cela n’empêchera pas le Strapontin de leur rendre hommage tout de même ! Saluons au passage la profonde humanité de Kim Hunter, dans le rôle de Zira, la performance débonnaire de Roddy Mc Dowall en Cornelius, et un Maurice Evans excellent dans le rôle du Dr Zaïus.

Charlton Heston
Roddy Mc Dowall
Kim Hunter
Maurice Evans

Linda Harrison
Robert Gunner
Jeff Burton
Norman Burton


Arrêts sur Images:

L’Introduction :
Un homme seul, aux commandes d’un vaisseau spatial : c’est Taylor, qui se pose des questions sur une humanité assez évoluée pour l’expédier dans l’espace, mais suffisamment primitive pour « regarder mourir de faim les enfants de son voisin ». Ce monologue se termine sur une remarque troublante sur la solitude : « Vu d’ici, tout paraît … sans limites. Je me sens très seul ». Cette simple séquence casse déjà l’image d’ « homme fort » de Charlton Heston et nous présente un personnage très cynique.



Le Crash :
Dans le projet initial, on devait voir le vaisseau s’écraser sur la planète. Faute de moyens, Schaffner trouvera une solution plus économique : filmer la séquence en caméra subjective, comme si cette dernière était à la place de l’appareil. Les mouvements désordonnés de la caméra annoncent déjà le style visuel très mobile de la photographie du film.


Un moment de tension pour la séquence où Taylor découvre une des astronautes momifiée. Le réalisateur utilise très intelligemment le bruit strident de décompression de la cabine pour souligner l’effet de surprise. Il est à noter que de la musique avait été composée pour ce passage mais que Schaffner a préféré se reposer sur les effets sonores.



Les Effets Visuels :
Malgré la présence au générique des trois spécialistes des effets spéciaux de la Fox (L.B. Abbott, Art Cruickshank et Emil Kosa Jr.), ils sont réduits à leur plus simple expression dans le film. Quelques effets de lumière inhabituels pour la séquence de marche dans le désert, une peinture sur verre pour la séquence où le vaisseau coule, et enfin, le fameux final avec la Statue de la Liberté, qui est également un matte painting, exécuté par Emil Kosa Jr.


Les Origines:
Le film présente beaucoup de ressemblances avec un épisode de la série The Twilight Zone, « I Shot an Arrow Into the Air ». Rien d’étonnant à cela puisque le co-scénariste Rod Serling était le créateur de la série. Cet épisode raconte l’odyssée de l’équipage d’un vaisseau spatial dont la Terre a perdu la trace après le décollage. Ecrasés sur une planète aride, ils vont s’entretuer pour survivre, jusqu’à ce que le dernier survivant ne se rende compte que le vaisseau n’avait jamais quitté la Terre et s’était crashé en plein désert.


La Marche dans le Désert :
D’emblée, le film est fidèle à son parti-pris et ne triche pas. Puisque cette planète est la Terre du futur, Schaffner a utilisé des décors naturels. Le crash a été tourné au Lac Powell, alors en cours de remplissage, et le reste des séquences en Arizona. D'emblée, il nous montre le cadre comme une planète étrangère, mettant l'accent sur la découverte de la végétation et de l'eau. Il fait naître un certain suspense en montrant que les astronautes sont suivis (mais on ne verra pas par qui), et avec l’apparition des épouvantails, dont l’aspect étrange, ni humain ni animal, provoque un certain malaise.


La Chasse à l’Homme :
C’est la séquence la plus célèbre du film, et sans nul doute la plus marquante. Soutenue par un travail de montage et une musique extraordinaires, son impact est toujours aussi saisissant. Notons que, malgré le fait que le public sache d’entrée ce qui va se passer, le film le maintient dans le même état de surprise que les astronautes, en ne montrant les singes qu’au tout dernier moment. La réalisation met l’accent sur des détails (des perches qui s’agitent dans un champ de maïs, les sabots des chevaux, des coups de feu… sans qu’on sache qui les tire !) pour renforcer leur toute première apparition. La séquence est d’une très grande violence, le film jouant d’ores et déjà le parti-pris de l’inversion des rôles et transformant les humains en gibier. Elle se termine sur un clin d’œil comique (des gorilles en train de poser pour une photo) qui renforce le côté absurde de la situation.


La Quête d’Identité de Taylor :
Sur le plan dramatique, Planet of the Apes est aussi remarquablement construit. La première partie met Taylor sur un pied d’égalité avec les autres humains du film, puisqu’une blessure le prive de la parole. Le spectateur est impliqué par ses tentatives pour communiquer, d'abord par l'écriture, ce qui prouve par ailleurs le fait que les hautes autorités simiesques tentent de cacher quelque chose. Les premières paroles de Taylor sont utilisées au moment opportun, et finalement très tard dans le film. Elles constituent le point d’orgue d’une tentative avortée d’évasion, un peu comme si elles traduisaient à la fois la colère de Taylor, mais aussi la frustration du spectateur de le voir repris:  « Take your stinking paws off me, you damn dirty ape ! », littéralement « Vire tes pattes puantes de moi, espèce de foutu singe dégueulasse ! », une réplique qui est d’ailleurs singulièrement adoucie dans la version française.


Les Secrets de la Zone Interdite :
La dernière partie emmène les personnages dans le désert, sur un site de fouilles qui pourrait apporter des réponses aux personnages. Elle est bâtie sur l’opposition entre le Dr Zaïus, qui connaît le secret de la planète, et Zira et Cornelius, deux scientifiques qui en ignorent tout et cherchent à comprendre. La séquence de la grotte laisse des indices sur « l’évolution inversée », sous la forme d’une poupée humaine qui parle. Enfin, le Dr Zaïus introduit la dernière surprise en mettant Taylor (et de la même manière le spectateur) en garde : « Vous n’aimerez peut-être pas ce que vous allez découvrir ».


Le Style Visuel :
A l’époque, les caméras ne pouvaient pas se permettre toutes les prouesses qu’elles effectuent aujourd’hui grâce aux stabilisateurs et aux montures spéciales. Cela n’empêche pas le style visuel du film d’être très original, avec des cadrages souvent désordonnés et très mobiles (ce qui, compte tenu du poids des caméras Panavision, ne devait pas être une mince affaire !). Ils renforcent le caractère brutal et sauvage de la mise en scène. Il y a parfois un aspect très "reportage", comme au début du film où la caméra portée suit les acteurs. A d'autres moments, les parti-pris de cadrage sont assez audacieux, un peu comme si le caméraman voulait garder à tout prix certains éléments dans le champ, même au risque de remuer la caméra dans tous les sens.



La Musique :
C’est l’un des éléments majeurs du film, et certainement un des plus novateurs. Bien qu’il s’agisse de S.F., elle refuse tout instrument électronique ou synthétique pour utiliser essentiellement des percussions et une approche très rythmique. A sa façon, la musique illustre donc les origines « Terriennes » de la planète, mais en détournant l’utilisation des instruments. Ce qui marque à la première écoute, c’est l’incroyable diversité des effets musicaux. La marche dans le désert est illustrée par des effets d’Echoplex (une chambre d’écho que le compositeur réutilisera d’ailleurs dans Patton), la découverte de l’oasis par des percussions métalliques (en réalité des bols de métal) et la première apparition des singes par des hurlements de cuivres (on avait d’ailleurs demandé aux musiciens de retirer l’embout de leurs instruments pour obtenir des résultats encore plus étranges). Sur le plan des percussions, la partition est aussi d’une grande richesse, utilisant des instruments comme la cuica, une sorte de tambour dont on frotte la peau. Il faut noter que le compositeur Jerry Goldsmith s’adjoindra les services de deux percussionnistes hors-pair, Shelly Manne et Emil Richards, et que c’est son ancien professeur Jakob Gimpel qui assurera les incroyables et complexes parties de piano. Bien que très innovante, la partition ne sera même pas récompensée par un Oscar. On peut aujourd’hui la trouver dans une édition très complète (Varese VSD-5848), et malgré le fait qu’il s’agisse d’une oeuvre assez difficile d’accès, elle compte parmi les authentiques chefs d’œuvre de la musique de film.




Le DVD:
En tant que classique certifié, Planet of the Apes a bien sur bénéficié de beaucoup de soin pour sa présentation sur DVD. D'abord publié sans bonus (mais dans une qualité d'image fort correcte), 20th Century-Fox a rectifié le tir en proposant en 2001 une édition 2 disques, nantie de nombreux suppléments. Le plus intéressant est une rétrospective sur la saga, qui réserve une très large place à la production du premier film. On trouvera également un commentaire audio du compositeur Jerry Goldsmith ainsi que la possibilité d'activer des sous-titres informatifs pendant le visionnage du film (une véritable mine d'informations). Il y a également des galeries de photos sur le merchandising et les costumes, un film amateur de l'acteur Roddy Mc Dowall sur le tournage. Enfin, une curiosité: le test filmé qui décida les producteurs à se lancer dans l'aventure. Niveau transfert du film, la qualité image et son est au rendez-vous.