mardi 31 juillet 2012

The Shadow

Film de Russell Mulcahy (1994), avec Alec Baldwin, Penelope Ann Miller, John Lone, Ian Mc Kellen, Tim Curry, etc...





























Difficile de trouver projet plus curieux que The Shadow : l’adaptation d’un serial ou autrement dit d’une série à épisodes, qui a quand même été déclinée sous forme de nouvelles, puis de BD, puis d’émission de radio… le tout dans les années 30-40. Pourtant, le personnage jouit d’une véritable popularité aux Etats-Unis, et c’est probablement ce qui a décidé les producteurs à tenter le coup sur le grand écran. Après tout, pourquoi pas ? A l’époque, les héros de BD commencent à cartonner au cinéma, Marvel n’avait pas encore envahi le marché, et on se tournait plutôt vers des adaptations de comics très classiques, comme l’ont prouvé des tentatives plus ou moins fructueuses comme Dick Tracy ou The Rocketeer.




On ne peut donc pas vraiment dire que The Shadow avait toutes les cartes en main pour séduire les foules, du moins à l’extérieur des USA, et le film s’est gentiment ramassé au box-office. Pourtant, il faut reconnaître que, s’il est loin d’être un chef d’œuvre, il possède néanmoins d’indéniables qualités qui en font un spectacle très plaisant, à défaut d’être complètement innovateur. Bien sûr, Alec Baldwin, dans le rôle principal, est aussi crédible qu’une endive. Bien sûr, le méchant est aussi impressionnant qu’une assiette de raviolis, mais peu importe. Le scénario, à base de domination mondiale, a déjà été vu et revu cent fois. Alors quoi ? Eh bien, malgré tout, on se laisse prendre au jeu, malgré la grosseur des ficelles et les péripéties archi-convenues.






C’est sur le plan visuel que The Shadow se démarque. Russell Mulcahy, le réalisateur, avait fait forte impression dans les années 80 avec des films comme Razorback ou Highlander, avant de sombrer dans la confection de sombres nanars. C’est donc une petite renaissance à laquelle on assiste ici, avec une mise en scène inventive et stylisée. Le film mise à fond sur son design rétro, formidablement appuyé par la direction artistique impeccable de Joseph Nemec III et la photo de Stephen H. Burum. Les effets visuels, à la fois classiques et innovants pour l’époque, renforcent une intrigue parfois un peu boiteuse.







Le charme finit par agir, et si on est loin d’une petite réussite comme The Rocketeer, The Shadow séduit par son absence de prétention et son aspect visuel . A l’opposé des autres films du genre, son côté pépère et nonchalant pourra en agacer certains. C’est du cinéma de Papa, du serial qui, loin de renier ses origines, sait aller à contre-courant des tendances pour imposer peinardement un certain spectacle à l’ancienne.










C’est ce mélange de savoir-faire pépère et de stylisation old school qui fait tout le prix de The Shadow. Comparé aux films de super-héros survoltés qui défilent sur les écrans à l'heure actuelle, celui-ci pourra paraître dépassé et limite ringard. A une époque où l'image de synthèse commençait tout juste à révolutionner le grand écran, on y savoure le ton désuet d'un certain cinéma Eighties. Moins typé que les Batman de Tim Burton, The Shadow n'est certainement pas un classique, mais une curiosité à découvrir.





Arrets sur Images
(Comme d'habitude, à ne lire qu'après avoir vu le film... ou pas!)

Le Trombi 
The Shadow a tout de même le mérite d’un casting qui, s’il n’est pas exceptionnel, contient suffisamment de « gueules » pour séduire le cinéphile moyen. Outre la présence de Penelope Ann Miller, dont le Strapontin ne se plaindra pas, on retrouve l’excellent John Lone (découvert avec L’Année du Dragon de Cimino et trop rare depuis), plus Ian Mc Kellen, Peter Boyle et Tim Curry.

Alec Baldwin
Penelope Ann Miller
John Lone
Ian Mc Kellen
Tim Curry
Peter Boyle
Jonathan Winters
Aaron Lustig
Sab Shimono



La photographie
L’un des atouts principaux du film. Elle est signée Stephen H. Burum, qui a très souvent travaillé pour Brian de Palma. On retrouve ici son goût pour les cadrages inventifs et les couleurs très saturées, qui apportent au film un lustre et un éclat visuel indéniables.





Burum utilise également la technique du split-field, chère à de Palma, qui permet de garder la netteté sur deux plans différents.




Les Effets Spéciaux
Combinaison de techniques anciennes et nouvelles, les effets de The Shadow renforcent  l’identité visuelle très forte du film. Maquettes et incrustations sont brillamment utilisées, de même que des peintures sur verre particulièrement réussies.






Le film utilise également les images de synthèse pour les séquences mettant en scène le Phurba, une sorte de poignard vivant particulièrement difficile à manier et dont le manche est une tête de divinité. La technologie en était alors à ses balbutiements, et le résultat paraît aujourd’hui un peu daté.






La Galerie de Miroirs
Petit hommage (ou clin d’œil) à La Dame de Shangaï d'Orson Welles, la séquence a en fait été considérablement remaniée. Originellement, les miroirs devaient refléter des images du passé du Shadow et le décor était beaucoup plus complexe. Malheureusement, il fût détruit par un tremblement de terre, ce qui obligera la production a refaire la scène en catastrophe, sur un mode plus économique.







La Musique
Même si elle ne figure pas au panthéon des chefs d’œuvre de son auteur, la musique de Jerry Goldsmith mélange avec bonheur des tonalités classiques avec des effets de synthétiseur, au gré d’une orchestration très variée. La partition est peut-être un peu trop marquée par l’influence du Batman de Danny Elfman, au travers d’un thème sur-exploité, mais elle sait se distinguer par certaines touches bienvenues, comme par exemple un impressionnant travail sur les percussions et des tonalités orientales. L'album original (quasiment introuvable à l’heure actuelle) ne proposait que 30 minutes de musique, au profit de chansons parfaitement dispensables, mais le label Intrada a récemment édité sur un double CD l'intégrale de la partition, qui peut être commandée ici







Le DVD
Le film n’est pas très bien servi par un transfert bon mais sans plus. La section sonore, en revanche, est bien meilleure, avec un Dolby Digital qui exploite à fond les effets directionnels liés au personnage (voir la séquence du pont). Pour mémoire, le film est un des premiers à utiliser le DTS. On est donc un peu surpris qu’il n’apparaisse pas parmi les configurations possibles Etant donné qu’il s’agit d’un titre de fond de catalogue Universal, le menu est fixe et vraiment très moche, et les suppléments inexistants. Néanmoins, un blu-ray un peu mieux fourni serait dispo en Allemagne… et donc bientôt peut-être chez nous !