mardi 31 décembre 2013

Le Voyage Fantastique

(Fantastic Voyage)
Film de Richard Fleischer (1966), avec Stephen Boyd, Raquel Welch, Donald Pleasence, Arthur Kennedy, William Redfield, etc...














 









A la base de Fantastic Voyage, il y a une idée tellement folle et tellement délirante qu’elle en serait presque surréaliste : cinq savants sont miniaturisés et injectés à bord d’un sous-marin dans le corps d’un homme qu’ils vont opérer « de l’intérieur ». Près de 50 ans après sa sortie, le film de Richard Fleischer reste l’une des plus films de SF les plus originaux et les plus atypiques des années 60. Retour sur une aventure et une œuvre définitivement hors du commun.



On a vraiment du mal à imaginer qu’à l’époque où Fantastic Voyagea été mis en chantier, la science-fiction est loin d’avoir la côte monstrueuse qu’elle possède aujourd’hui. 2001 n’est pas encore passé par là. En dehors des inévitables séries B, il y a juste eu quelques tentatives de films à gros budget, comme Planète Interdite ou La Machine à Remonter le Temps, qui ont prouvé qu’il existait un créneau pour une SF familiale. Donc, quand la Fox lance le projet, elle prend quand même un sacré risque, avec un budget plus que conséquent pour l’époque (6 millions ½ de $). Bingo ! Le film est un gros succès, qui du même coup incitera la compagnie à exploiter le filon avec la saga de La Planète des Singes.





Ce qui frappe dans Fantastic Voyage, c’est son côté enfantin et merveilleux. Au lieu de jouer la carte de la véracité scientifique (ce qui aurait été particulièrement difficile), le réalisateur Richard Fleischer préfère transformer cette odyssée improbable en aventure extraordinaire, qui évoque plus d’une fois Jules Verne : Voyage au Centre de la Terre, que la Fox produisit quelques années auparavant, mais aussi 20.000 Lieues sous les Mers, que Fleischer dirigea brillamment pour le compte de Disney. Les situations ont beau être extravagantes, on se laisse emporter comme un gamin au gré de péripéties énormes et souvent tirées par les cheveux.






Peu importe que les effets spéciaux soient voyants et datés, ou que l’interprétation soit parfois ampoulée et excessive.  Fantastic Voyage, c’est la quintessence d’un certain cinéma populaire dans lequel on prend plaisir à élaborer de savantes péripéties, juste pour le plaisir d’exploiter à fond le cadre de l’intrigue. Les différentes parties du corps deviennent ainsi porteuses de menaces mortelles, quand ce ne sont pas les globules blancs ou les anticorps qui attaquent les personnages. A ce propos, ne pas manquer la scène cultissime où ces derniers se jettent littéralement sur Raquel Welch (on les comprend, n’importe quel spectateur normalement constitué aurait probablement rêvé d’en faire autant !).




Le film panache avec habileté plusieurs genres. Il démarre comme un thriller, avec un prologue totalement muet, puis on bifurque vers la SF high-tech. Ensuite, l’aventure à l’intérieur du corps humain impose un ton à la fois rêveur et onirique, une esthétique définitivement sixties qui dérape parfois vers le pop-art. Le plasma devient une sorte d’océan bouillonnant, qui tient de la vinaigrette et de la lampe à lave. Les décors archi-stylisés, d’ailleurs récompensés par un Oscar, sont magnifiques.







C’est bien entendu un cinéma pourri de clichés et nourri de bons sentiments, mais cela fait partie du plaisir du spectacle. La mise en scène de Richard Fleischer, effacée mais efficace, mène l’aventure tambour battant et pratiquement en temps réel, et la musique de Leonard Rosenman donne vie de manière particulièrement inhabituelle à cet univers riche et foisonnant.







Fantastic Voyage a sans doute pas mal vieilli par certains aspects, il est clair qu'on ferait aujourd'hui mille fois mieux sur le plan technique. Mais malgré ces limitations, il a su au fil des années conserver intact son pouvoir de fascination. A la fois pépère dans sa mise en images et risqué dans ses choix esthétiques et musicaux, le film est un petit classique, un spectacle superbe et unique en son genre, dont le concept délirant est exploité avec beaucoup d'intelligence, de savoir-faire et d'une certaine poésie. Gamin mais magique.










Arrêts sur Images
(Comme d'habitude, section à ne lire qu'après avoir vu le film)


Le Trombinoscope
La vraie vedette du film, c'est l'histoire. On ne trouvera donc pas de grosses vedettes dans le casting, mais plutôt des visages qu'on reverra souvent dans des seconds rôles. Stephen Boyd était le méchant de Ben-Hur. On reverra Arthur O'Connell dans L'Aventure du Poséidon et Edmond O'Brien dans La Horde Sauvage. Plus rares sont les apparitions de William Redfield, qu'on reverra dans Vol au-Dessus d'un Nid de Coucou en 1976 et qui décèdera un an après. Signalons enfin la prestation de Jan del Val, qui tient un rôle muet mais néanmoins essentiel: celui du patient, le Dr. Benes.



Stephen Boyd
Raquel Welch
Donald Pleasence
Arthur Kennedy
William Redfield
Arthur O'Connell
Edmond O'Brien
Jan del Val
 
Le Générique
Première cassure de style du film avec un générique totalement à l'opposé de l'introduction, qui est elle très typée et très sombre. Il fallait mettre l'accent sur l'aspect scientifique de l'intrigue, afin de "rassurer" le spectateur, désarçonné par le caractère inattendu de la première séquence. Le générique reste cependant très neutre, il s'agit d'un montage sur des instruments médicaux, mais qui évite délibérément toute connotation futuriste. Enfin, il n’y a pas de musique, afin de respecter l’approche musicale voulue par le compositeur Leonard Rosenman. Le fond sonore est seulement constitué de bruitages.






Les décors
Il y a deux types de décors dans le film : ceux qui servent dans les scènes où évoluent les acteurs, et ceux utilisés pour montrer le cheminement du sous-marin. Ils ont donc été réalisés à des échelles différentes. Les décors miniatures, comme celui du cœur, étaient adaptés à la taille de la maquette.



 


Les décors grandeur nature, quant à eux, consistaient pour la plupart de tentures blanches décorées de motifs. Ensuite, le directeur photo Ernest Laszlo a utilisé des projecteurs avec des gels colorés, afin de leur donner un aspect plus organique. Il a d’ailleurs joliment résumé sa technique sur ce film au fait de « peindre avec de la lumière ».


 



Le Proteus
Le sous-marin est la véritable vedette du film. Il a été conçu par Harper Goff, avec qui le réalisateur Richard Fleischer avait déjà travaillé sur 20.000 Lieues sous les Mers. Son design inhabituel semble avoir été inspiré par le sous-marin Neptune de la série TV Voyage au Fond des Mers, avec un poste d’observation qui offre une vue imprenable sur l’extérieur. Pour le tournage, certaines portions étaient escamotables, ce qui permettait de bénéficier d’angles de prises de vues aussi variés que possible. Il a été réalisé à plusieurs échelles différentes, dont une version en miniature qui, s’il faut en croire la petite histoire, a été subtilisée par un oiseau ( !) durant le tournage.


 



Les Effets Spéciaux
Ils ont été réalisés par l’équipe de la Fox, qu’on retrouve au générique de presque tous les films de cette époque : L.B. Abbott, Art Cruickshank et Emil Kosa Jr. Abbott était le spécialiste maison des effets visuels, mais le travail sur le film était tellement énorme qu’il demandera à la production d’engager un collaborateur supplémentaire. Art Cruickshank, venu des studios Disney, lui prêtera donc main forte sur ce projet, puis travaillera sur d’autres films de la Fox avant de revenir chez l’oncle Walt. Un Oscar récompensera son travail sur Fantastic Voyage.





Les globules et les différentes particules présentes dans le sang ont été réalisés en injectant dans l'eau différents liquides tels que l'huile qui, une fois en suspension, produisaient l'effet escompté. Plusieurs couches de ces images ont ensuite été superposées pour renforcer l'effet de bouillonnement.

 



Vu qu’il était matériellement impossible d’immerger les gigantesques décors du film, Fantastic Voyage a été tourné selon la technique du dry for wet, c’est-à-dire « à sec ». Autrement dit, pour les scènes où les personnages étaient censés nager dans le plasma, ils étaient en fait suspendus à des câbles, et filmés à 3 fois la vitesse normale, ce qui, à la projection, se traduisait par des mouvements très lents.


 


L’aspect translucide était obtenu avec des objectifs spéciaux sur la caméra. Certaines séquences pouvaient nécessiter jusqu’à 4 acteurs suspendus, la production s’est donc assuré les services de Peter Foy, un spécialiste de cette technique, qui venait tout juste de boucler une version théâtrale de Peter Pan.





Pour certains plans, la version miniature du Proteus a été filmée sous l’eau, dans un bassin spécialement équipé. C’est L.B. Abbott qui a supervisé la réalisation de ces séquences.



 



L’injection du sous-marin dans les veines utilise une maquette à grande échelle pour la seringue. La verrière du sous-marin et le pilote ont été filmés sur écran bleu et superposés à la scène. Le plan du Proteus sortant de la seringue a également été tourné en bassin en utilisant l’extérieur de la maquette.






Les anticorps et autres globules blancs étaient manipulés par des fils. Pour les scènes où ils sont censés attaquer les personnages, ils étaient d’abord fixés sur le corps de l’acteur, puis retirés à distance par les câbles. La scène était filmée à l’envers. De cette manière, une fois projetée normalement, cela donnait l’impression que les anticorps attaquaient et se collaient sur leurs victimes.





Le film utilise également des effets d'animation pour les tirs de laser et les particules brillantes dans le cerveau. Ils ont été créés séparément puis superposés aux images.


 


La Musique
Leonard Rosenman n'est pas un nom très connu du grand public. Sa musique, très complexe, ne se laisse pas apprivoiser facilement, tant elle n'obéit à aucune structure particulière. C'est davantage un paysage sonore, dans lequel seul un semblant de thème essaie de s'imposer, au milieu d'architectures musicales imposantes. La partition joue un rôle primordial dans la description de l'univers si particulier du film, elle n'intervient d'ailleurs qu'après une quarantaine de minutes, lorsque le sous-marin est injecté dans le corps.

 

Tout comme la musique de La Planète des Singes, celle de Fantastic Voyage est le reflet d'une approche très innovante telle que la Fox la pratiquait dans les années 60. Il fallait oser imposer une musique aussi atonale et difficile dans un film grand public. Elle est pourtant un ingrédient indispensable, au même titre que les effets ou les décors, pas comme le papier peint qui fait actuellement office d'accompagnement musical. Bien évidemment, on s'en doute, il était risqué d'éditer une musique si atypique au moment de la sortie du film, même si ce dernier a été un succès. C'est le label FSM qui sortira le CD de la partition en 1998, soit plus de 30 ans après, dans une édition limitée à 4000 exemplaires, qui est bien entendu devenu depuis un article de collection. Un album hautement conseillé, même si le style très particulier de Rosenman peut en rebuter certains.











 
En vidéo
Gros carton du catalogue Fox, Fantastic Voyage a été traité avec les honneurs en vidéo. D'abord une première édition avec le strict minimum (une bande-annonce et basta), puis une réédition US avec quelques bonus, mais qui ne sera hélas jamais commercialisée en France. On attendait donc de pied ferme la sortie du blu-ray, et le fait est que sur le plan technique, on n'est pas déçu: le design coloré est magnifiquement mis en valeur par un transfert image de toute beauté. De même, le remix DTS est respectueux du mixage mono d'origine et met bien en valeur la musique. Une seule ombre au tableau, et de taille: aucun supplément n'est sous-titré ! Il semble que ce soit la nouvelle politique éditoriale de la Fox (ils nous avaient déjà fait le coup avec Hello Dolly) et c'est franchement regrettable. Pour ceux qui possèdent une bonne connaissance de l'anglais, il y a donc deux commentaires audio: un sur l'aspect technique, l'autre axé sur la musique, avec la partition isolée. Il y a également un reportage sympathique sur les effets spéciaux, une galerie de photos et une comparaison storyboard/scène finalisée. Donc une édition au top pour sa qualité d'image, mais pas vraiment pour le soin que lui a apporté l'éditeur.

Invasion

(The Invasion)
Film de Oliver Hirschbiegel (2007), avec Nicole Kidman, Daniel Craig, Jeremy Northam, Jeffrey Wright, Veronica Cartwright, etc...

Amis du recyclage, bonjour ! Tout comme on nous apprend que tout ou presque est réutilisable, il y a des idées qui resservent régulièrement dans le cinéma américain. Zombies, vampires and co, c’est toujours bien pratique pour une industrie qui peine à trouver des idées nouvelles. Parmi ces bons clients du grand écran, mais moins connus quand même, on trouve les body snatchers, qu'un traducteur un peu crétin a transposé en "profanateurs de sépultures" alors qu'on pourrait plus justement les appeler les "infiltreurs de corps".

Mais te demanderas-tu, ami lecteur, c’est quoi donc les body snatchers ? Eh bien, ces sympathiques créatures sont nées de l’imagination du romancier Jack Finney, et ne sont ni plus ni moins que des extra-terrestres décidés à coloniser la Terre en remplaçant les humains par des répliques parfaites, à la différence qu’ils ne possèdent pas d’émotions. La première (et la meilleure) des adaptations remonte à 1954, et il y en eut deux autres en 1978 (plutôt réussie) et en 1993 (plutôt bof).

Aujourd’hui, The Invasion remet donc le couvert sous la houlette du réalisateur Oliver Hirschbiegel. Un choix plutôt étrange, quand on sait que le bonhomme s’était fait connaître avec La Chute, qui relatait les dernières heures de la vie d’Hitler. Etait-il réellement l'homme de la situation ? En tout cas, son premier montage ne plaira pas du tout aux producteurs. Le film sera copieusement remanié en post-production, et des scènes additionnelles tournées par le réalisateur James Mc Tiegue (V for Vendetta).

Difficile de savoir ce qui clochait dans le montage original, même si on se doute un peu qu’avec le producteur de Matrix et des Arme Fatale aux commandes, on a probablement cru bon d’en rajouter dans le spectaculaire et les poursuites, même si ce n’est pas vraiment le sujet du film. Ce qui est intéressant, c’est la paranoïa, la description d’un monde où on ne peut faire confiance à personne, et où la moindre seconde de sommeil est fatale, puisque les extra-terrestres en profitent pour infiltrer leurs victimes.

Et effectivement, c’est dans ce registre que The Invasion fonctionne le mieux, sans pour autant atteindre l’efficacité des précédentes versions. C’est sûr, la technique a fait des progrès, et le film accumule les effets spéciaux avec des plongées speedées dans l’ADN en pleine transformation. Nicole Kidman, qui à l’époque n’avait pas encore terminée sa mutation au botox, est plutôt convaincante, assistée par un Daniel Craig dans sa période pré-Bond. Mais le film se perd très vite dans des péripéties artificielles, et surtout, il botte en touche avec un happy end totalement artificiel et crétin. Seule petite touche sympathique, la présence de Veronica Cartwright, qui jouait déjà dans la version 78.





Tout l’intérêt du sujet, c’était justement son côté jusqu’au-boutiste et totalement apocalyptique, qui n'épargnait personne et ne laissait aucun espoir à la race humaine. Privé de cela, The Invasion n’est plus qu’un thriller lambda sans conviction, parfois efficace mais totalement vain.

lundi 30 décembre 2013

A Perdre la Raison

Film de Joachim Lafosse (2013), avec Emilie Dequenne, Tahar Rahim, Niels Arestrup, Yannick Renier, Nathalie Boutefeu, etc...



 















A Perdre la Raison fait partie de ce genre de films dans lesquels il est difficile d’entrer. Le film s’ouvre sur une situation forte, donne quelques indices au spectateur, puis c’est un long retour en arrière dans lequel on essaie de comprendre le pourquoi du comment. Ce qui est très déstabilisant, c’est qu’en fait, là où on attend des aspérités, des éléments forts, des situations dramatiques, on se retrouve avec la peinture on ne peut plus classique du quotidien d’un couple. Alors oui, il y a bien ce personnage énigmatique et envahissant du docteur, dont on se demande un peu quel rôle véritable il peut jouer. L’essentiel est ailleurs.

En fait, A Perdre la Raison n’est ni plus ni moins que la description de la plongée d’une femme dans la folie, mais pas une folie spectaculaire et explicable, bien au contraire. C’est une folie qui nait des non-dits, de l’insatisfaction, puis de la dépression. Une folie qui finit par déboucher sur une issue d’autant plus terrifiante que nous public, nous n’en verrons rien, et d’autant plus glaçante que rien dans le film ne nous l’expliquera réellement.





Emilie Dequenne, dans le rôle principal, est impériale. Celle qui fût autrefois la Rosetta des frères Dardenne se donne à fond dans un rôle extrêmement difficile et ingrat, dans lequel elle fait preuve d’un degré d’implication absolument incroyable. La voir fondre en larmes alors qu’elle reprend une chanson de Julien Clerc est un moment tellement déchirant qu’il en devient presque douloureux. Elle est la raison d’être et l’épine dorsale d’un film qui, malgré la force de sa conclusion, a plutôt  tendance à tourner en rond et à se complaire dans un naturalisme un peu creux à la Maurice Pialat. 


dimanche 29 décembre 2013

American Nightmare

(The Purge)
Film de James DeMonaco (2013), avec Ethan Hawke, Lena Headey, Max Burkholder, Edwin Hodge, Rhys Wakefield, etc...

















Décidément, l’Amérique n’en n’a pas fini avec ses démons en ce qui concerne l’auto-défense. Dernier film à apporter de l’eau au moulin, The Purge repose sur un pitch malin : pendant une nuit par an, les services d’urgence sont fermés et la populace est libre de donner libre cours à ses instincts meurtriers en éliminant les rebuts de la société ou plus simplement en faisant sa justice soi-même. Ça s’appelle la Purge, c’est d’ailleurs le titre original, et on notera comment le titre français s’en démarque avec habileté. C’est un point de départ diablement intéressant, qui aurait pu donner lieu à une réflexion sur la violence.

Simplement, il est clair dès les premières minutes que le réalisateur se tamponne royalement du commentaire social que pourrait susciter de son sujet et n’y a finalement vu que matière à faire de la baston de manière assez gratuite. En fait, le postulat de départ dévie très vite : une famille américaine bien propre sur elle recueille malgré elle une cible de la Purge, un SDF black. S’en suit un jeu du chat et de la souris avec la milice de jeunes très très méchants qui voudrait mettre la main dessus.

On pense bien sûr aux Straw Dogs de Sam Peckinpah, à Funny Games aussi, à Assaut également. Bref, le réalisateur James De Monaco a de quoi assurer niveau références. Elles ont du mal à dissimuler le manque total d’inspiration de la mise en scène, qui se contente d’aligner bêtement et mécaniquement les traques à l’intérieur de la maison. Ça fonctionne, mais de manière totalement machinale, sans qu’une seule fois on ne prenne un tant soit peu de recul vis-à-vis du sujet.

Sur la fin, le film pourrait presque passer pour une version dégénérée de The Burbs, tiens ! On en rajoute une couche sur la parano entre voisins, juste histoire de. A la limite, The Purge serait presque plus marrant à analyser qu’à voir, puisque parallèlement aux messages douteux sur l’auto-défense, le film distille également quelques petites perles sur ces voisins pas gentils qui envient votre réussite et sont prêts à vous trahir à la première occasion. 




Bon, tout ça pour dire que ce The Purge ne pisse pas bien loin, mais ça n’a pourtant pas empêché le public de lui faire un bon petit succès, ce qui nous vaudra (c’est confirmé) une suite qu’on imagine encore plus destroy. Ça promet…

vendredi 20 décembre 2013

Kick Ass 2

Film de Jeff Wadlow (2013), avec Aaron Taylor-Johnson, Chloë Grace Moretz, Jim Carrey, Christopher Mintz-Plasse, John Leguizamo, etc...


















Kick Ass, le premier du nom, a été une véritable claque dans l’univers très formaté du film de super-héros. Croisement improbable entre teen movie, polar à la Guy Ritchie et épopée comics style Batman, le film était une sacrée surprise, le genre de réussite jubilatoire et inattendue qui vous met dans sa poche en rien de deux, bref un petit classique sur lequel le Strapontin ne manquera pas de revenir à l’occasion.

Le film a également fait un beau carton, d’où l’inévitable conséquence, la tentation pour les producteurs de faire marcher à nouveau la planche à billets en concevant une suite. D’emblée on peut dire qu’avec Kick Ass, la démarche était quand même un peu casse-gueule, car le film possédait une telle originalité de ton qu’il était très difficile de recréer la surprise, à moins d’oser partir dans une direction totalement nouvelle.

C’est difficilement ce qu’on pouvait attendre d’un réalisateur comme Jeff Wadlow, dont les états de service se limitent à un ou deux films pas vraiment mémorables. Matthew Vaughn, qui avait mis en scène le premier opus, est producteur, mais c’en est à se demander s’il a réellement eu un droit de regard sur le film tellement on est loin, très très loin de l’original.

Déjà, l’histoire n’est pas franchement intéressante. Bon, Kick Ass dégote des associés aussi branques que lui, parmi lesquels Jim Carrey qui, pour l’occasion, s’est fait la tronche du major Chip Hazard de Small Soldiers. De son côté, Hit Girl est reprise en main par son tuteur et essaie de mener une scolarité normale, l’occasion de tailler un beau costard aux pétasses et autres bimbos. Et puis, il y a Red Mist, le fils du méchant dans le premier film, qui essaie de monter une armée de super-méchants dégénérés.

On voit bien que tout cela ne pisse pas bien loin. En plus, les auteurs ont cru bon d’en rajouter dans l’humour crotte-de-nez bien scato. Les gags à base de vomi ou de diarrhée, ça fera peut-être marrer les ados, mais ça s’arrête là. Et puis, surtout, on en a rajouté des caisses dans le registre de la violence qui tâche beaucoup, avec quelques saillies aussi gores que parfaitement gratuites. Le film fait des pieds et des mains pour être aussi choquant que possible, mais tout ça reste un peu vain.

En fait, Kick Ass 2 n’a rien compris à ce qui pouvait faire la singularité du premier film, qui était hyper-violent certes, mais qui avait pour lui une liberté de ton et une décontraction dans la mise en scène, totalement absente ici. Qui plus est, Christopher Mintz-Plasse, dans le rôle du méchant, plombe le film dès les premières minutes. Impossible de le prendre ne serait-ce qu’une minute au sérieux, et encore moins lorsqu’on lui colle un tenue cuir SM. Le film est déjà suffisamment caricatural, le fait de lui rajouter un bad guy aussi limite plombe tout le reste.




Alors oui, ça défouraille un max, et il est plus que probable que le cœur de cible visé, le public jeune, attendra avec impatience un Kick Ass 3. C’est le but du jeu. Les autres, ceux qui avaient loué l’originalité et la coolitude du premier épisode, arrêteront les frais avec ce numéro 2 sans réelle surprise ni saveur.