mardi 17 juin 2014

L’Homme qui murmurait à l’Oreille des Chevaux

(The Horse Whisperer)

Film de Robert Redford (1998), avec Robert Redford, Sam Neill, Kirstin Scott-Thomas, Scarlett Johansson, Dianne Wiest,etc…

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Robert Redford cinéaste, ce n'est pas ce qu'on pourrait appeler un artiste hors du commun. Tout au contraire, l'acteur a bien pris soin d'éviter les grosses prises de risque, au fil d'un parcours très balisé et très lisse, définitivement sans surprises. J'avais bien aimé son tout premier, Ordinary People, pour des raisons très personnelles, et en définitive, je ne suis pas loin de croire que chacun peut trouver un certain attachement à l'un ou l'autre de ses films selon la nature de son vécu. C'est un cinéma fait de grandes émotions finalement universelles, c'est ce qui le rend facilement appréhendable, mais aussi quelque part un peu conventionnel.

 

vlcsnap-2014-06-16-22h34m43s253Je n'avais jamais vu The Horse Whisperer mais je m'étais fait le film dans ma tête, et force est de constater que je n'étais pas très loin du compte. Redford le vieux dresseur qui redonne goût à la vie à une jeune Scarlett Johansson et à son cheval, après un grave accident, c'est déjà un peu du cousu main en matière de scénario. Partant de là, la maman ne peut être qu'une personne obtuse et bornée qui reçoit elle aussi une belle leçon de vie et finit par tomber amoureux du vieux bougon qu'elle ne pouvait pas saquer au début, le tout étalé sur 3 heures de projection. Voilà.

 

 

C'est joli, gentiment soporifique (j'avoue à ma grande honte avoir piqué du nez à plusieurs reprises) et plus proche de l'esthétique du cowboy Marlboro que de celle du mélodrame flamboyant. La seule véritable bonne idée du film, c'est le changement de format en cours de projection. On passe ainsi du format classique au scope dès qu'on arrive dans les grands espaces. Un gimmick sympathique, mais qui hélas ne rendra pas grand chose sur votre home cinéma. Ah si ! Scarlet est excellente, mais ça on le savait déjà. 

 

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dimanche 15 juin 2014

Le Convoi de la Peur

(Sorcerer)

Film de William Friedkin (1977), avec Roy Scheider, Bruno Cremer, Amidou, Francisco Rabal, Ramon Bieri, etc…

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Curieux parcours que celui de William Friedkin : après avoir explosé le box-office avec French Connection et L'Exorciste, il n'est jamais réellement parvenu à retrouver les faveurs du grand public comme ont pu le faire Spielberg, Lucas ou Coppola. Friedkin est un franc tireur, dont les films ne cherchent pas toujours à caresser le spectateur dans le sens du poil, loin de là. Ses choix ne vont pas forcément vers des sujets à gros potentiel commercial. Cela en fait une sorte d'outsider, pas vraiment reconnu par ses pairs et qui avec le temps est presque devenu un cinéaste maudit, un peu à l’instar d’un Michael Cimino.

 

vlcsnap-2014-06-11-22h27m50s234Le parcours de Sorcerer est à cet égard significatif. Sorti en loucedé en 1977, le film n'a jamais trouvé son public et les deux major companies, Universal et Paramount, qui s'étaient associées sur la foi des précédents succès du réalisateur, se sont retrouvées avec un gouffre financier monstrueux qui a en quelque sorte enterré la carrière de Friedkin. Du coup, le film est rapidement devenu invisible, et a été transformé en une sorte de chef d'œuvre maudit et culte façon Heaven's Gate. Jusqu'alors uniquement disponible dans une édition DVD à la qualité plus que médiocre, il est aujourd'hui disponible dans une superbe copie (dont la restauration a d'ailleurs été plus ou moins financée par le réalisateur), l'occasion donc de remettre les pendules à l'heure.

 

 

 

 

vlcsnap-2014-06-11-22h18m59s77Au Strapontin, on avait vu le film lors de sa sortie française et il faut reconnaitre qu'à l'époque, il avait été traité avec un zeste de mépris par la critique. Pensez donc, un réalisateur à succès hollywoodien qui s'attaquait au remake d’un grand classique français, Le Salaire de la Peur. D'entrée de jeu, Sorcerer était donc attendu au tournant. En toute honnêteté, s'il méritait beaucoup mieux que l'accueil critique qu'il a reçu, il est cependant loin de valoir la réputation de chef d'œuvre dont on voudrait aujourd'hui l'affubler. C'est un film solide et prenant, auquel il manque sans doute des personnages mieux dessinés et un rythme plus soutenu.

 

 

 

 

vlcsnap-2014-06-11-22h22m54s135Car malgré une longue séquence d'intro, qui présente un à un les différents protagonistes, on ne vibre pas vraiment pour eux tout au long de l'aventure. On comprend bien que cette équipée est une sorte de dernière chance pour chacun d'entre eux, mais cela reste très froid, l'identification avec les personnages demeure vraiment minimale. Ce n'est pas étonnant quand on connait Friedkin et son approche nihiliste et très réaliste, à la limite du reportage. Mais quelque part, dans ses précédents films, il avait su faire percer un semblant d'humanité qui est ici absent.

 

 

 

 


vlcsnap-2014-06-10-23h55m19s97Pour contrebalancer, l'aspect technique du film est effectivement admirable.Tourné en pleine jungle, Sorcerer éblouit plus d'une fois par l'authenticité de son cadre. Tout comme Spielberg avait joué la carte de la crédibilité en tournant Jaws en pleine mer, Friedkin fait de même en pleine forêt amazonienne. De plus, jamais le film ne fait de concession à des effets spectaculaires inutiles, et le morceau de bravoure, cette traversée des camions sur un pont de lianes, est un grand moment de cinéma. Mais le film souffre aussi d'un déséquilibre certain entre une présentation des personnages maladroite, inutilement étoffée et un périple qu'on aurait souhaité par contre moins resserré.





vlcsnap-2014-06-10-23h55m32s0La réalisation est particulièrement brute de décoffrage, avec une violence plutôt sanglante qui paraît parfois un peu artificielle, un peu comme si Friedkin voulait rester fidèle à l'image no limit qu'il avait imposée avec The Exorcist. Dommage par contre que des acteurs aussi remarquables que Roy Scheider, Bruno Cremer ou Amidou s'échinent à donner vie à des personnages creux et mal définis. Et un gros bémol pour les synthés criards et poisseux de Tangerine Dream, qui enracinent encore plus le film dans les années 70.

 

 

 

 

 

Mais malgré tout, ce Sorcerer reste un spectacle fascinant, une épopée sauvée par l'efficacité et le réalisme de sa mise en scène, même si l'original de Clouzot lui reste supérieur quant aux motivations des personnages. Il faut cependant saluer le jusqu'au-boutisme de l'entreprise, et l'audace d'un réalisateur-producteur qui n'hésitera pas à braver les modes pour imposer jusqu'au bout un projet casse-gueule et se ruiner dans la foulée. Peine perdue: quelques semaines plus tard, un petit film auquel personne ne croyait et répondant au doux nom de Star Wars explosera tout sur son passage. Malgré ses défauts, ce petit classique mérite donc d’être redécouvert et réévaluré. A moitié convaincant, certes, mais indiscutablement fascinant.



 

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sorcerer BREn vidéo

Le moins qu’on puisse dire, c’est que Sorcerer n’a pas été gâté par sa première édition vidéo : image pourrave, absence de 16/9ème, bref la cata, un DVD tellement pourri qu’il n’avait même pas franchi l’Atlantique et était resté une édition strictement américaine. Fort heureusement, William Friedkin lui-même, agacé par le fait que les majors qui avaient produit le film n’en fassent rien, prend les choses en main et investit ses propres deniers dans une restauration.

Le résultat, on peut en juger sur le blu-ray paru récemment chez Warner Home Video: un transfert image et son magnifique, c’est vraiment du beau travail. Manque juste un documentaire qui raconte la tumultueuse production du film, mais malheureusement, ni Universal, ni Paramount, détentrices des droits, n’ont voulu faire d’efforts pour le réhabiliter. On se consolera donc avec un livret de 40 pages inclus avec le blu-ray. Un peu maigre, mais c’est tout de même mieux que rien. Le disque n’est pour l’instant disponible qu’en import américain, mais il est parfaitement compatible et lisible sur les platines françaises.

lundi 9 juin 2014

Non-Stop

Film de Jaume Collet-Serra (2014), avec Liam Neeson, Julianne Moore, Anson Mount, Lupita Nyong’o, Michelle Dockery, etc…

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Si vous avez connu les années 90, vous avez certainement vu une production Joel Silver. Mais si, vous savez bien ! Un bon gros polar des familles, avec une intrigue béton, où ça tire dans tous les sens. Outre le fait d'avoir lancé la franchise Matrix, Silver est également à l'origine de la série des Die Hard. Rien d'étonnant, donc, à ce qu'il en reprenne la formule pour ce Non-Stop. Après tout, c'est bien dans les vieux pots qu'on fait la meilleure soupe, surtout lorsqu'on est à l'origine de la recette.

 

vlcsnap-2014-06-09-21h59m15s49Donc vous avez un flic en perte de vitesse qui est un peu alcoolo, un huis-clos (ici un avion) et un vilain terroriste qui menace de tuer tout le monde si on ne lui verse pas une rançon maousse sur son compte en Suisse. Voilà pour les bases. Accessoirement, histoire de créer un peu la nouveauté et rester dans l'air du temps, toutes les phases du chantage se dérouleront par SMS interposés. Et inévitablement, le bon flic, c'est l'homme de la rue, en l'occurrence le brave Liam Neeson, qui, après les Taken, continue à se forger une image d'action hero tranquille, le genre calme en apparence mais qu'il faut surtout pas faire chier sinon il s'énerve et met des pains à tout le monde.


 

vlcsnap-2014-06-09-21h51m51s220Et il s'énerve le bon gars Liam, au gré d'une intrigue un peu fumeuse et d'un suspense aux petits pieds. Pour dynamiser un peu tout ça et faire dans dans la coolitude, les échanges par SMS, clé de l'intrigue, sont intégrés à l'image, d'une façon qui rappelle furieusement le récent Course à la Mort (chroniqué ici). Ça fait joli et branché, et ça détourne un peu l'attention du spectateur d'un concept de base qui est quand même assez con-con. Parce que le bon Liam va déployer des trésors d'ingéniosité pour savoir qui lui pourrit sa messagerie. Et le pot au roses, une fois qu'il est révélé, est franchement bien loin de valoir tout ce ramdam.


 

vlcsnap-2014-06-09-22h04m13s103Donc, suivant la formule Joel Silver, il y a inévitablement un climax plein de bruit, de fureur et d'action pour emballer tout ça. Vu qu'on est dans un avion, ça limite un peu les possibilités, par conséquent, on louche vers le film-catastrophe façon Airport, avec une bonne louche d'effets spéciaux et des situations tellement over the top qu'elles en deviennent franchement ridicules. N'ayez crainte, le bon Liam sauvera la petite fille d'une mort certaine et règlera du même coup son vieux traumatisme et son problème de picole.

 


 

C'est mis en scène très professionnellement, et il faut au moins reconnaitre à Jaume Collet-Serra une certaine efficacité dans la réalisation, qui parvient à camoufler les nombreuses énormités du scénario. C'est déjà ça. Pour le reste, si vous laissez consciencieusement vos neurones au vestiaire et ça ne vous dérange pas de voir Liam Neeson, excellent acteur au demeurant, jouer les utilités dans un polar couillu mais sans génie, ce film est fait pour vous.

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mardi 3 juin 2014

The Way - La Route Ensemble

(The Way)

Film d’Emilio Estevez (2010), avec Martin Sheen, Emilio Estevez, Deborah Kara Unger, Yorick Van Wageningen, James Nesbitt, etc…

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Les bons sentiments font-ils forcément les bons films ? C'est la question qu'on se pose à la vision du film d'Emilio Estevez, The Way, qui raconte le pèlerinage d'un américain bon teint (c'est Martin Sheen) sur le chemin de St Jacques de Compostelle. Peu de films ont été consacrés à cet itinéraire aussi spirituel que personnel, c'était donc l'occasion d'illustrer cette démarche si intime. Quand en plus on voit Martin Sheen au générique, ça donne envie. Il fait partie de ces acteurs discrets et pourtant si riches, toujours capables de vous étonner au détour d'une réplique. 

 

vlcsnap-2014-06-02-21h06m25s181The Way respire la sincérité, c'est clair dès les premières images. Sheen et son fils Emilio Estevez, qui réalise, ont eux-mêmes fait le pèlerinage de St-Jacques et cherchaient un moyen d'en parler par le biais d'un film. Et effectivement, cette histoire d'un père qui est amené à se lancer sur les traces de son fils décédé fournissait la matière idéale, ceci d’autant plus que,  Sauf qu'en définitive, la matière en question se révèle tout de même assez pauvre pour tenir la distance sur un long-métrage.

 

 

 


La faute à des personnages mal dessinés ou inintéressants, qui ne servent jamais réellement un scénario un peu basique. Il y avait pourtant matière à de beaux portraits, mais Estevez se contente de personnages secondaires sans relief ni humour, qui n'éveillent jamais la curiosité du spectateur. Entre le gros lourd qui veut maigrir et l'américaine cynique (Deborah Kara Unger, méconnaissable), en passant par l'écrivain raté, The Way a visiblement du mal à trouver le ton juste. Restent alors de beaux paysages, quelques belles scènes entre Martin Sheen et son fils, et un final touchant qui respire effectivement une certaine ferveur. Ce n'est pas assez pour faire un film, même si on sent qu'il vient du cœur.


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dimanche 1 juin 2014

12 Years a Slave

Film de Steve Mc Queen (2013), avec Chiwetel Eijiofor, Lupita Nyong’o, Michael Fassbender, Brad Pitt, Benedict Crumberbach, etc…

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Quelque part, quand on veut faire bouger un sujet auquel le spectateur est trop habitué, il faut aller toujours plus loin et taper toujours plus fort. C'est ce que fait 12 Years a Slave, qui a construit son bouche-à-oreille sur une scène effectivement repoussante de violence au  cours de laquelle une esclave noire est fouettée jusqu'au sang. A partir de là, chacun pourra argumenter sur le besoin réel de pousser cette séquence jusqu'aux limites du supportable, mais on ne peut nier que l'espace de quelques instants, elle transforme le film en véritable électrochoc.

 

vlcsnap-2014-06-01-22h29m24s152La saga du héros est un long chemin de croix, que quelque part les auteurs distinguent un peu du lot en choisissant de nous montrer que la gangrène de l'esclavage pouvait tout aussi bien toucher des gens cultivés et bien intégrés, brusquement privés de leur statut social pour être revendus sur la place publique. La survie dans 12 Years a Slave, le héros la doit à son éducation, de même que le fait de pouvoir relater cette histoire "de l'intérieur". Mais on ne peut s'empêcher de penser à tous ceux qui n'avaient même pas cette ressource pour traverser cet enfer.

 

 

vlcsnap-2014-06-01-22h40m12s100Le réalisateur Steve Mc Queen est ici plus convaincant que dans Shame, son précédent film (dont on vous parle d'ailleurs ici). Cela n'empêche pas le film de ne pas être très nuancé quant à ses personnages plutôt stéréotypés. On n'échappe pas, une fois encore, aux méchants contremaitres sadiques (d'abord Paul Dano puis Michael Fassbender) ou au bon maitre aux allures de Jésus (Brad Pitt, d'ailleurs producteur du film). Seul Benedict Crumberbach offre une prestation un peu plus subtile dans le rôle du premier maitre, avec un personnage plus singulier qui apporte une touche d'humanité dans cet univers cauchemardesque.

 

 

Par contre, le parti-pris descriptif très froid adopté par le film le prive de toute émotion. Cela évite bien sur de tomber dans le sentimentalisme hollywoodien ou la larmichette facile mais on se dit qu'après ces deux heures passées en plein cauchemar, on aurait bien aimé ressentir davantage pour son héros. Un film qui vous en met plein la gueule, donc, mais qui a indéniablement du mal à parler au cœur.

 

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