lundi 11 juin 2012

The Weather Man

Film de Gore Verbinski (2005), avec Nicolas Cage, Michael Caine, Hope Davis, Gemmenne de la Peña, Nicholas Hoult, etc...





















Franchement, à la première vision, je n’ai pas su quoi penser de ce film, comme apparemment pas mal de monde, puisqu’il s’est pris une bonne broutée, tant avec la critique qu’avec le public. Il faut dire que cette chronique de la vie d’un présentateur météo, Nick (Nicolas Cage) ne caresse pas vraiment le spectateur dans le sens du poil. Comment, en effet, rendre attrayant le portrait d’un loser patenté, à la ramasse dans sa vie familiale ? Un peu comme American Beauty, c’est un film sur la crise de la quarantaine, narré en voix off par un personnage principal au bout du rouleau.

Et puis, petit à petit, le charme finit par agir, et on est séduit quelque part par l’itinéraire de ce Nicolas Cage aux airs de chien battu. Maladroit, brimé par son père (Michael Caine), jamais pris au sérieux par son public (on lui balance de la bouffe à la figure) ou sa famille, le héros trouvera tout de même le chemin de la rédemption et de quoi donner un nouveau souffle à sa vie.







The Weather Man est un film bien inhabituel de la part de Gore Verbinski, qui s’était surtout fait une réputation dans le divertissement familial (Pirates des Caraïbes) ou la comédie cartoonesque (La Souris). Le cocktail n’est pas complètement réussi, sans doute parce que quelque part, on éprouve beaucoup de mal à s’identifier au héros. Pourtant, au fur et à mesure, on finit par s’attacher à lui à son itinéraire. Nicolas Cage, qui s’est souvent fourvoyé dans des choix artistiques discutables, est ici excellent. Il arrive à transcender la médiocrité et la mollesse du rôle qu’il incarne pour en faire quelque chose de finalement très touchant et d’unique.



Totalement atypique, The Weather Man est une œuvre à découvrir, au risque d’être surpris et dérouté. Assez paradoxalement, le film fonctionne beaucoup mieux à la seconde vision. A découvrir, donc, et à redécouvrir.


vendredi 8 juin 2012

Le Reptile

(There Was a Crooked Man)
Film de Joseph L. Mankiewicz (1970), avec Kirk Douglas, Henry Fonda, Warren Oates, Burgess Meredith, Hume Cronyn, etc…


 






















Quoi de plus inattendu qu’un western de la part de Joseph L. Mankiewicz ? Quant on a donné au 7èmeArt des chefs d’œuvre comme Eve ou Le Limier, c’est un peu inhabituel d’aller taper dans un genre diamétralement opposé, et pourtant, s’il existe un metteur en scène qui a fait, tout au long de sa carrière, la preuve de son éclectisme, c’est bien lui. Capable tout aussi bien de signer un film d’espionnage malin (L’Affaire Cicéron) qu’un peplum pharaonique (Cléopatre), Mankiewicz a toujours refusé les étiquettes.




A l’époque ou sort There was a Crooked Man, le bon vieux western traditionnel américain a pris un sacré coup dans l’aile, d’abord avec les films de Sergio Leone, puis avec ceux de Sam Peckinpah. L’Ouest n’est plus un Eldorado où triomphent l’honneur et la vertu, c’est un territoire crade, sans foi ni loi, où évoluent les pires crapules. Hollywood devient plus permissif dans la description de la violence et le genre s’en ressent, avec des œuvres comme La Horde Sauvage, qui n’hésitent pas à braver les foudres de la censure, mais qui imposent également une atmosphère différente. L’Ouest n’est définitivement plus ce qu’il était.





Pas étonnant donc de retrouver au générique les scénaristes Robert Benton et David Newman, déjà responsables du script de Bonnie & Clyde. Cela nous vaut quelques petits clins d’œil très contemporains et plutôt inhabituels dans le genre. En même temps, There was a Crooked Man pourrait être tout sauf un western, puisqu’il ne récupère du genre que le cadre, et refuse constamment les habituelles scènes à faire. On pourrait même très bien imaginer l’intrigue située de nos jours. Le film suit en effet l’itinéraire d’un voleur, Paris Pittman (Kirk Douglas), qui a caché le butin d’un cambriolage avant de se faire mettre en prison. S’en suit alors toute une série de manigances entre lui, ses co-détenus et même le directeur de la prison, qui veulent tous obtenir une partie du magot.





Comme toutes les autres oeuvres de Mankiewicz, There was a Crooked Man est un film sur la manipulation, avec à la clé quelques savoureux retournements de situation. Il brosse un portrait pittoresque de tout un petit groupe de détenus avec il est vrai des personnages plutôt stéréotypés (la grosse brute, le beau gosse, le vétéran, le couple homosexuel) mais attachants, et servis par un casting aux petits oignons. Le film est peut-être un peu maladroit à certains moments, on sent Mankiewicz pas toujours très à l’aise, mais cela est compensé par des dialogues ciselés et naturels. Cela a toujours été le point fort du réalisateur et il ne déçoit pas ici, dans un genre qui a priori ne s’y prête pas forcément. Le texte brillant est remarquablement mis en valeur par un face-à-face régalant entre Kirk Douglas et Henry Fonda. Autant Douglas excelle dans le registre de la crapule intégrale, autant le jeu plus retenu de Fonda fait des merveilles.





Par contre, la musique, commise par Charles Strouse, n’est pas vraiment à la hauteur. Il semblerait que le compositeur ait été recruté sur la base de son travail sur Bonnie & Clyde, mais on ne peut pas franchement dire que sa partition maladroite, au comique forcé, serve beaucoup le film. Il faut dire, pour sa décharge, que Strouse était plutôt un compositeur de comédies musicales et qu’il n’était pas forcément très à son aise en travaillant pour le grand écran.






Avec son esprit décalé, There was a Crooked Man est surtout un chef d’œuvre d’humour et d’intelligence. Comme dans ses meilleurs films, Mankiewicz joue avec le spectateur et l’égare dans un jeu de dupes dont il tire les ficelles. Avec lui, les personnages ne sont ni tout blancs, ni tout noirs, ils évoluent dans un monde où règnent la duperie et le mensonge. Si elle ne possède pas le génie vertigineux ou la perfection dramatique d’un chef d’œuvre comme Le Limier (dont le Strapontin vous reparlera très bientôt), cette incursion westernienne est une curiosité, à la fois drôle, ingénieuse, diablement sympathique et parfaitement cynique.








Le Trombinoscope

Une distribution top moumoute avec en tête de liste Kirk Douglas, qui n’a jamais été meilleur dans un registre aussi putassier que possible. Parmi la distribution, la présence de Warren Oates assure le lien avec les westerns de Sam Peckinpah, et on retrouve également Burgess Meredith (futur entraîneur dans Rocky) et Hume Cronyn (futur retraité dans Cocoon). Assez surprenant: la présence de l'actrice Lee Grant qui, bien qu'elle apparaisse pendant une durée record de 5 minutes, a tout de même eu droit à son nom sur l'affiche du film !



Kirk Douglas
Henry Fonda
Warren Oates
Burgess Meredith
Michael Blodgett
John Randolph
Hume Cronyn
Martin Gabel
Lee Grant



Enfin, ne fois n’est pas coutume, le titre français, Le Reptile, est particulièrement malin, car il s’applique aussi bien au personnage de Kirk Douglas qu’à un des éléments-clés du film. Il faut dire que le titre original (Il était une fois un Escroc) n’était pas vraiment terrible, d’où peut-être le peu de succès remporté par le film.