dimanche 27 avril 2014

Cloverfield

Film de Matt Reeves (2012), avec Lizzy Caplan, Odette Annable, Jessica Lucas, Mike Vogel, T.J. MIller, etc…

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Ami lecteur, connais-tu le found footage ? Mais si, tu sais bien, ces pseudo-reportages filmés au caméscope et qu'on essaie de vous vendre comme des trucs pris sur le vif. La mode a été lancée il y a pas mal de temps avec Le Projet Blair Witch, un truc bricolé avec deux francs six sous mais qui parvenait tout de même à flanquer une sacrée trouille. Du coup, vu qu'Hollywood est toujours un peu à court d'idées nouvelles, on nous refait le coup aujourd'hui avec un Paranormal Activity plutôt moisi. Bref ... Tout ça pour dire que les pseudos films qui veulent vous donner l'impression qu'ils sont tournés avec la caméra de papa, très peu pour moi.

 

vlcsnap-2014-04-27-14h20m18s111Ce style caméra au poing, très reportage est probablement ce qui est arrivé de pire au cinéma ces dernières années, allant même jusqu'à gâcher des trucs  potentiellement excitants comme par exemple Chronicle ou District 9. Voilà pourquoi en ce qui concerne Cloverfield, j'y allais un peu à reculons. Se fumer tout un film basé sur ce principe, merci mais non merci. Et en effet, les premières séquences m'ont un peu donné raison, avec une interminable séquence de teuf où on apprend que untel a couché avec untel ou bien que untel voudrait se taper la mignonne près du bar. Bref... On s'en tartine dix bonnes minutes avant de rentrer dans le vif du sujet. 

 

 

 

vlcsnap-2014-04-27-14h25m59s220Ensuite le vrai film commence, et alors là, ça dépote grave ! Le style "pris sur le vif" fonctionne à fond, pour la bonne et simple raison que ces images de panique, nous les avons déjà vues. Elles nous semblent bien familières après le 11 septembre. Mais surtout, malgré son aspect brut de décoffrage, le film est loin d'être bricolé. Les équipes des effets spéciaux ont véritablement fait des miracles pour arriver à créer l'illusion tout en s'insérant parfaitement dans le style de l'ensemble.

 

 

 

 

vlcsnap-2014-04-27-14h06m12s108 Et surtout, Cloverfield respecte la règle d'or de tout bon film d'horreur qui se respecte : ne pas trop montrer la créature et laisser travailler l'imagination du spectateur. On ne la verra que fugitivement, à la dérobée, l'aspect visuel chaotique encourageant ce type de mise en scène. Le film tente parfois d'en faire un petit peu trop, en démultipliant la menace. c'est là qu'il s'avère le moins bon et qu'il montre ses limites. Toutes les scènes avec les bestioles arachnoïdes sentent le délayage, un peu comme si le réalisateur ne savait pas trop comment meubler la durée pourtant assez courte du film.

 

 

 


Malgré ses défauts et ses facilités, Cloverfield surprend, même si en définitive il implique davantage le spectateur grâce à sa mise en forme punchy que par ses personnages aussi ternes qu'inintéressants.

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samedi 26 avril 2014

Last Days of Summer

(Labor Day)

Film de Jason Reitman (2014), avec Kate Winslet, Josh Brolin, Tobey Maguire, Gattlin Griffith, Maika Monroe, etc…

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Racontée comme ça, l'intrigue de Last Days of Summer peut paraître simple, voire basique : un détenu en cavale (Josh Brolin) se réfugie chez une femme (Kate Winslet), qui vit seule avec son fils de 16 ans. C'est le point de départ d'un film qui marie intelligemment le drame et l'observation psychologique, le genre qui ne paye pas forcément de mine durant les premières séquences, mais qui installe tranquillement son univers pour ensuite monter en puissance, se charger d’émotion, et vous mettre dans sa poche.

 
 
vlcsnap-2014-04-25-23h37m23s178Jason Reitman, le réalisateur, s'était jusqu'alors principalement signalé par des comédies gentillettes (Thank You for Not Smoking, Juno) et pas forcément finaudes. On est donc agréablement surpris par cette évolution de son style vers un cinéma plus adulte. On pense souvent au Clint Eastwood d'Un Monde Parfait, même si le personnage du bandit au grand cœur peut paraitre un peu bateau et si le film ne s'interdit pas certaines invraisemblances.
 
 
 
 
 
 
vlcsnap-2014-04-25-23h36m25s63On est touché par le personnage fragile de Kate Winslet, cette femme isolée de tout et de tous que le réalisateur étudie et détaille avec beaucoup de finesse et de sensibilité, mais aussi par un scénario qui livre ses cartes maitresses dans un désordre soigneusement étudié. Même si le procédé tend à devenir un peu systématique actuellement, ce genre de narration déstructurée nous implique émotionnellement, chacun reconstituant les différentes portions d'une histoire dans laquelle il ne faut pas se fier aux apparences. Le film offre également une méditation fine et sensible sur l'adolescence, portée par la belle présence du jeune Gattlin Griffith.
 
 
 
Passons un peu sur le procédé qui vise à coller un titre anglais qui n'a rien à voir avec le titre original. Bon, vous me direz que le Labor Day, n'a pas vraiment la même signification aux USA que chez nous (et puis franchement, vous iriez voir un film qui s'appelle Fête du Travail, vous ?) et que finalement,  le titre, bien qu’anglicisé, est plutôt bien choisi. Bien entendu, Last Days of Summer n'a rien de révolutionnaire ni de novateur, mais dans le genre qui est le sien, c'est un film généreux et touchant, qui émeut, captive et séduit.
 
 
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mardi 22 avril 2014

Un Singe en Hiver

Film d’Henri Verneuil (1962), avec Jean Gabin, Jean-Paul Belmondo, Suzanne Flon, Noël Roquevert, Paul Frankeur, etc…

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J’avais le souvenir d’avoir vu ce film étant tout gosse, un dimanche soir à la télé. A l’époque, j’étais un grand fan de Bébel, c’était un peu mon action hero, au fil des diffusions télé de films comme L’Homme de Rio ou Cartouche. Du coup, du haut de mes 10 ans, il est clair que ça m’était largement passé au dessus. Depuis, et malgré la côte inoxydable du film auprès du grand public, je n’avais pas trop osé tenter le coup. Henri Verneuil, je n’étais pas vraiment client, bien que je me sois passionné à l‘époque pour des Bébeleries comme Le Casse, qui m’était apparu avec le recul comme plutôt nanardesque et assez raté. Le peu que j’avais pu voir du reste de sa filmo m’avait pas vraiment convaincu.

 

vlcsnap-2014-04-21-00h33m35s91Mais vu que le Strapontin révise ses classiques, il était logique de repasser par celui-là. Pourtant, ça commence plutôt mal, avec Gabin qui cabotine à mort et en fait des caisses dans le registre pochetron magnifique, puisqu’il joue un ex-alcoolo qui a juré de ne pas toucher une goutte de bibine, et qui va être tenté de repiquer avec l’arrivée de Belmondo. C’est un peu le problème avec ce genre de performance : malgré le texte sur mesure d’Audiard, c’est une opportunité pour l’acteur de se donner en spectacle jusqu’à un point où cela en devient gênant, ce qui est finalement un peu le cas quand on se retrouve en présence d’un ivrogne.

 

 

vlcsnap-2014-04-21-00h38m18s113Le plus réussi dans Un Singe en Hiver, c’est l’évocation poétique des raisons qui poussent l’un et l’autre à boire. C’est toute une foule de souvenirs qui ressurgit, tout un pan du passé des personnages qu’ils tentent de faire revivre de manière dérisoire. C'est dans ces réminiscences d'un passé disparu que le film s'avère le plus convaincant. Entre le jeune chien fou, dont on se demande si la boisson lui sert de remède ou de raison de vivre, et le vieux qui s'octroie un dernier baroud d'honneur avant de tirer le rideau, le film laisse entendre une musique douce-amère qui en fait tout le prix, même si on se dit quelquefois que les déconnades de ces deux grands enfants sont parfois plus pathétiques que réellement drôles.

 

vlcsnap-2014-04-21-00h40m40s3On pardonnera donc au film ses quelques lourdeurs, son émotion un peu artificielle (toute la partie avec la fille de Belmondo) et ses numéros d'acteurs un peu énormes et cousus-main, où Gabin m'apparait paradoxalement moins convaincant et à l’aise que d’habitude. Pourtant, il y a quelques belles surprises, comme le savoureux personnage du commerçant joué par Noël Roquevert. Mais pour quelques moments de finesse, il y a aussi pas mal de maladresses (ah, cette manie de vouloir nous rabâcher l’explication du titre, des fois qu’on n’aurait pas tout compris la première fois !) et une intrigue qui tourne un peu en rond.

 

Un Singe en Hiver possède pour lui quelques sympathiques échanges de ping-pong verbal entre deux monstres sacrés, et une histoire suffisamment atypique pour exciter la curiosité, mais pas assez développée pour emporter l’adhésion. Tel quel, emballé qu’il est dans les bons mots d’Audiard et la réalisation un brin trop sage de Verneuil, le film est une curiosité pas désagréable, aux allures de petit classique.

 

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mercredi 9 avril 2014

La Traversée de Paris

Film de Claude Autant-Lara (1957), avec Jean Gabin, Bourvil, Louis de Funès, Jeannette Batti, Robert Arnoux, etc…

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D'emblée, Gabin et Bourvil au générique, ça vous donne déjà des allures de classique. Quand en plus vous rajoutez De Funès dans une scène d'anthologie ("monsieur Jambier, 45 rue Poliveau!!"), le film rentre très vite dans la catégorie des œuvres cultes du cinéma français. Et ça n'est que justice. Adapté d'une nouvelle de Marcel Aymé, ce "road movie" à la française est une merveille d'humour goguenard et de bons mots.

 

vlcsnap-2014-04-09-22h17m52s5Les deux personnages, Grandgil et Martin, sont donc chargés de traverser Paris à pied pendant l'occupation avec des valises bourrées de viande destinée au marché noir. Claude Autant-Lara, le réalisateur, brosse un portrait savoureux mais parfois acerbe des comportements pendant cette période trouble, pointant du doigt les combinards, mais aussi ces français éteints par l'ennemi, et ayant abandonné toute velléité de révolte au profit de la lâcheté. L'occasion pour Gabin de se lancer dans un de ses plus célèbres monologues, qui étonne encore aujourd'hui par sa férocité et sa verve.

 

 

 

 


vlcsnap-2014-04-09-22h21m08s156Face à lui, Bourvil tient un rôle mi-figue mi-raisin, pas complètement comique, mais pas non plus ouvertement dramatique. Il abandonne son personnage habituel de benêt pour jouer les faux durs. La réalisation d'Autant-Lara est simple et appliquée, avec parfois quelques belles idées, comme la séquence de l'arrestation, montrée uniquement en ombres chinoises. Le budget modeste du film oblige l’équipe à privilégier le tournage en studio.l Les rues de Paris, ainsi reconstituées, prennent du coup une dimension poétique qui confère un ton très particulier à cette aventure.

 

 

 

 


 

Quand sur la fin, le tragique reprend ses droits, il le fait sans véritable happy end, d'une façon abrupte qui casse l'ambiance de comédie que le film a soigneusement installée. Une conclusion dramatique, puisqu'elle condamne un des personnages à la déportation, mais rachetée au dernier moment par une belle scène de retrouvailles. Point final émouvant d'un petit classique qui, s'il n'est pas exempt de quelques défauts, demeure le prototype même d'un cinéma d'acteurs dans tout ce qu’il peut avoir de délectable et de jubilatoire.

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Le monologue de Grandgil

Scène d’anthologie de La Traversée de Paris, elle se passe dans un bar où les deux héros se réfugient pour échapper à la police. Gabin, poussé à bout par les manières de l’aubergiste et de sa femme, finit par s’énerver et pousser l’une de ses plus mémorables gueulantes. Le texte est millimétré, mais trouve pourtant une incroyable spontanéité dans la bouche de l’acteur. C’est un grand moment, qui surprend par sa crudité et son incroyable énergie.

vlcsnap-2014-04-09-22h04m46s102Grandgil (Jean Gabin) :Non mais regarde moi le mignon, là, avec sa face d'alcoolique et sa viande grise ! Avec du mou partout ! Du mou, du mou, rien qu'du mou ! Mais tu vas pas changer de gueule un jour, toi, non ? Et l'autre, là, la rombière ! La gueule en gélatine et saindoux ! Trois mentons, les nichons qui dévalent sur la brioche ! 50 ans chacun, 100 ans pour le lot, 100 ans de connerie ! 

Martin (Bourvil): Mais où est ce qu'il va chercher tout ça ?

Grandgil : Mais Qu'est ce que vous êtes venus foutre sur terre, nom de Dieu ? Vous n'avez pas honte d'exister, hein ?

L’aubergiste : Mais je ...

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Grandgil :
Tais toi ! Tais toi !
(les clients se lèvent et s’avancent vers Grandgil et Martin)
Et eux, là tiens ! Tu sais où ils vont, Martin ? Ben ils vont prévenir les flics ! Oh mais arrêtez, j’ai beaucoup mieux que ça pour vous, moi ! Vous êtes quatre hommes avec des bras, nous on est que deux. Qu’est-ce que vous attendez pour foutre le camp avec nos valises ? Hein ? Allez, reniflez moi ça, sentez moi ça si ça sent bon, vous qui mangez que du boudin à la sciure et buvez de l’eau du robinet ! Z’avez à bouffer pour trois semaines là dedans ! Eh ben, allez y quoi ! Vous savez bien qu’on n’ira pas se plaindre ! Hé ben, qu’est-ce que vous attendez ? Regarde les, tiens ! Ils bougent même pas ! Et après ça ils iront aboyer contre le marché noir ! Salauds de pauvres ! Et vous, là, affreux ! Je vous ignore, je vous chasse de ma mémoire, je vous balaie !”

lundi 7 avril 2014

The Immigrant

Film de James Gray (2013), avec Joaquin Phoenix, Marion Cotillard, Jeremy Renner, Dagmara Dominczyk, Angela Sarafyan, etc…

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A priori, Marion Cotillard en immigrée polonaise, ça devrait le faire moyen. C'est du moins ce qu'on se dit en voyant le casting du nouveau film de James Gray. Et puis non, finalement notre petite Marion ne se sort pas trop mal de cette chronique appliquée qui raconte les mésaventures d'une jeune femme à son arrivée à New York et ses démêlés entre deux hommes qui la désirent.

 

vlcsnap-2014-04-07-20h53m37s43James Gray a réussi à s'imposer dans le paysage du cinéma américain indépendant. A coup de petites réussites comme Little Odessa, The Yards ou We Own The Night, il s'est désigné comme un héritier plutôt doué de Scorsese, tout en imposant un ton très personnel, qu'on retrouve par exemple dans Two Lovers, surprenante love story en demi-teintes. Avec The Immigrant, il s'attaque avec hélas moins de brio à la saga historique.

 

 

 

vlcsnap-2014-04-07-20h57m34s119On ne peut pas vraiment dire qu'il s'agit là d'un mauvais film. La reconstitution est tirée à quatre épingles, baignée dans une superbe lumière signée Darius Khjondi qui évoque avec bonheur le deuxième volet du Parrain. Les acteurs sont également extraordinaires, de Joaquin Phœnix qui signe une fois encore un personnage hors du commun à Jeremy Renner, dont le talent toujours discret fait ici des merveilles. Pourtant, quelque chose ne se passe pas. The Immigrant est un film appliqué mais sans âme, où on se contrefiche très vite du déroulé de l'histoire et du destin des protagonistes,

 

 

En dépit de la qualité de sa mise en scène, sur laquelle il n'y a rien à redire, The Immigrant est paradoxalement un film languissant et vide d'émotion. De la part de James Gray, on attendait beaucoup mieux.

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jeudi 3 avril 2014

American Bluff

(American Hustle)

Film de David O. Russell (2013), avec Christian Bale, Amy Adams, Bradley Cooper, Jennifer Lawrence, Jeremy Renner, etc…

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Ce qui marque en premier dans American Hustle, ce sont les coupes de cheveux. Mises en avant sur l'affiche, le film s'ouvre effectivement dessus, avec une longue scène où un Christian Bale méconnaissable se bat contre une moumoute et une coiffure savamment étudiée. Il faut dire que David O. Russell n'a pas vraiment gâté son casting dans ce domaine: Bradley Cooper frisé (on le voit même avec des bigoudis dans une scène!), Jeremy Renner avec une belle tartine sur la tête, bref niveau brushing, ça envoie du lourd ! Franck Provost n'a qu'à bien se tenir !

 

vlcsnap-2014-04-03-15h58m37s245 Au Strapontin, on ne s'était pas vraiment joint à l'unanimité qui avait salué Happiness Therapy (d'ailleurs chroniqué ici). En dépit de l'attrait des moumoutes, on était donc un peu sceptiques devant ce nouvel opus. Finalement, American Hustle s'en sort plutôt bien. S'il n'évite pas les défauts de son prédécesseur, notamment sur les performances d'acteurs en roue libre, il s'avère être une sympathique comédie à la manière de Scorsese. On pense aux Affranchis ou à Casino bien sûr, mais aussi à Boogie Nights, pas des références bateau, donc.

 

 

vlcsnap-2014-04-03-15h59m15s140 L’intrigue est assez savoureuse, sur fond d’arnaques et de magouilles politiques, ou comment un pro du métier (c’est Christian Bale) est manipulé par le FBI pour faire tomber des hommes politiques. C’est parait-il inspiré d’une histoire vraie. Tout ça fleure bon les seventies, depuis la réutilisation du logo de la Columbia jusqu’aux décors et aux costumes, plus criards tu meurs. Et inévitablement, la B.O. déchire, bourrée à craquer qu’elle est de bons vieux tubes de l’époque assez judicieusement choisis. Bref, tous les ingrédients sont au rendez-vous pour un résultat énorme.

 

 

Pourtant, American Hustle peine à convaincre, tourne parfois à vide et accuse quelques grosses baisses de régime. Et surtout, on sent constamment que le réalisateur a favorisé l’improvisation et le numéro d’acteur au détriment de l’histoire elle-même. Cela donne un résultat un peu brouillon et bordélique, mené à la va-comme-je-te-pousse, et où il est clair que les comédiens se font plaisir et sont souvent excellents (en particulier Amy Adams et Jennifer Lawrence). Le spectateur, lui, est un peu à la ramasse et c’est dommage, car le film aurait grandement profité d’une intrigue plus maitrisée et de personnages plus développés. Même si, tel quel, American Hustle reste tout de même divertissant et très agréable.

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mercredi 2 avril 2014

Blue Jasmine

Film de Woody Allen (2013), avec Cate Blanchett, Sally Hawkins, Peter Sarsgaard, Alec Baldwin, Andrew Dice Clay, etc…

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Ça fait plaisir de voir revenir Woody Allen en aussi bonne forme. Le récent Midnight in Paris n’avait pas franchement convaincu le Strapontin (d’ailleurs, on vous en parle ici), et du coup on avait allègrement zappé le suivant, To Rome with Love. Il faut bien dire que la productivité légendaire du réalisateur autorise quelques faux pas, et qu’en sortant en moyenne un film par an, le bon Woody n’allait pas non plus maintenir une qualité au top sur chacun d’entre eux.

vlcsnap-2014-04-01-16h36m28s105 Blue Jasmine le voit renouer avec l’étude de mœurs qui lui avait si bien réussi par le passé. L’héroïne, Jasmine (Cate Blanchett), est une “ancienne riche”, mise sur la paille par des évènements dont on apprendra petit à petit la véritable teneur. Elle va donc renouer avec sa sœur Ginger (Sally Hawkins), qu’elle a perdu de vue depuis des années. L’occasion pour Woody Allen de décrire la juxtaposition de deux univers qui n’ont rien en commun, celui de Jasmine, snob et superficielle, et celui de Ginger, plus nature et spontanée. Avec, en toile de fond, des rancœurs familiales irrésolues et des blessures jamais vraiment refermées.

 

vlcsnap-2014-04-01-16h12m14s154 Le réalisateur croque son personnage principal de la même manière qu’il dépeignait les intellectuels bobos dans Manhattan, mais il pousse beaucoup plus loin l’acidité du portrait, allant même jusqu’à la caricature sans pour autant que cela ne soit artificiel ou facile. Outre la confrontation de deux classes sociales opposées, c’est aussi le portrait d’une femme qui se révèlera au fur et à mesure comme une véritable paumée. Il faut tout le talent de Cate Blanchett pour parvenir à humaniser ce personnage imbu de lui-même et à nous le faire aimer malgré tout.

 


Woody Allen manie les sentiments avec une incroyable habileté et une maitrise dont il semblait avoir perdu le secret depuis bien longtemps. Alors que les pièces du puzzle se mettent en place au gré des différents flashbacks, il scelle le destin de son héroïne dans une fin à la fois cruelle et pathétique. Victime d’elle-même, Jasmine inspire la pitié après nous avoir fait sourire. C’est un itinéraire assez inhabituel et plutôt singulier dans l’œuvre du réalisateur, et il donne paradoxalement un film très attachant et subtil, même si son personnage principal est bien loin de l’être.


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mardi 1 avril 2014

Gravity

Film d’Alfonso Cuaron (2013), avec Sandra Bullock et George Clooney.

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Le moins qu’on puisse dire du dernier film d’Alfonso Cuarón, c’est qu’il ne laisse personne indifférent. Là où certains saluent une œuvre forte, qui nous fait physiquement ressentir ce que pourrait être une virée en apesanteur, d’autres dénoncent un cinéma à la limite du film de parc d’attractions. Comme Gravity cartonne au box-office, ça n’arrange pas les choses, loin de là. Quand un film fait l’unanimité, il y a forcément un retour de bâton plus important de la part de ceux qui n’ont pas aimé, et qui sont du coup bien contents et très fiers d’agiter les pieds dans le plat et de crier bien fort qu’ils ne se sont pas laissés avoir.

 

vlcsnap-2014-03-30-21h39m36s171Le mot qui revient tout le temps au sujet de Gravity, c’est qu’il est immersif. Grace à une 3D intelligemment utilisée et un travail de caméra littéralement en apesanteur, il nous met dès le départ à la place de ses personnages, suspendus dans l’espace et entrainés dans un combat pour la survie. C’est ce côté quasiment interactif qui fait toute la force du film. On y brasse la peur du vide, la désorientation, l’angoisse de la mort. C’est une aventure humaine, avec tout ce qu’elle peut avoir d’artificiel et de convenu, mais aussi ses lignes de force. Sandra Bullock, après une enfilade de nanars plus ou moins recommandables, y livre une performance dépouillée et touchante.

 

 

vlcsnap-2014-03-30-21h50m41s191Gravity me fait beaucoup penser à un petit film méconnu des années 70, Les Naufragés de l’Espace, de John Sturges, qui était hélas sabordé par des effets spéciaux un peu miteux. Rien de cela ici. Ici, la technique du film, pourtant assez révolutionnaire, devient transparente et renforce la crédibilité de l’histoire, même si le film cède un petit peu trop souvent au besoin un peu gratuit de faire du spectaculaire. Cet empilement systématique des péripéties saborde un peu la dernière partie, en voulant taper dans le registre du grand spectacle. C’est un peu paradoxal de voir Cuarón déployer des trésors d’habileté technique pour établir la crédibilité du cadre de son intrigue, puis nous balancer des situations tellement extrêmes qu’elles en défient un peu la logique.

 

vlcsnap-2014-03-30-21h44m47s246Le réalisateur continue ici avec brio un parcours cinématographique passionnant. Passer ainsi de la comédie de mœurs décomplexée (Yu Tu Mama Tambien) au film pour enfants (A Little Princess) en signant au passage le meilleur épisode de la saga Harry Potter (Le Prisonnier d’Azkaban) et un des films de SF les plus originaux de ces dernières années (Les Fils de L’Homme), ça égare un peu le critique, même si son œuvre a toujours été profondément marquée par une certaine poésie et un attachement aux personnages. Au fil de son périple spatial, il nous livre des bribes d'information, ne définit pas complètement le passé de ses personnages, laissant le spectateur créer sa propre histoire.

 

vlcsnap-2014-03-30-21h53m09s125Le film devient au fil de son déroulement une véritable aventure humaine. Au-delà de ses aspects spectaculaires, Gravity devient une parabole sur la volonté de survie. Rien ne rattache le personnage de Ryan Stone à la vie, et c’est symboliquement la voix de son collègue astronaute qui la poussera à dépasser ses limites et à trouver ce désir de rester en vie. Dans l’une des séquences les plus touchantes du film, Ryan capte une transmission radio de la Terre à laquelle elle ne comprend rien, mais qui parvient cependant à lui apporter un semblant de cordialité. C’est un moment tout simple qui résume admirablement tout le contenu humain et chaleureux du film.

 

 

vlcsnap-2014-03-30-21h40m13s21Cet aspect est tellement simple et réussi qu’on en voudrait presque à Cuarón de retomber dans le spectaculaire. C’est le mélange entre humanité et grand spectacle qui n’est pas totalement convaincant, tant on a parfois l’impression que le film retombe dans les effets spéciaux quand il patine dans son approche plus personnelle. Il se passe trop de choses un peu trop démesurées pour rester dans le parti-pris de réalisme dont se recommande le film.

 

 

 

Néanmoins, même avec ses défauts, Gravity enterre allègrement toutes les grosses machines décérébrées du moment pour nous proposer une vision de l’espace inédite et prenante. A défaut d’être un film franchement personnel, ou le chef d’œuvre annoncé par certains, le film de Cuarón est une aventure unique, dont les choix esthétiques audacieux impliquent le spectateur comme cela n’avait jamais été fait auparavant. C’est déjà beaucoup.

 

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La Technique

A première vue, on ne saisit pas vraiment ce que les effets spéciaux de Gravity peuvent avoir de révolutionnaire, ce qui en dit long sur la qualité du travail fourni par les équipes qui ont travaillé sur le film. Et pourtant, si je vous dis qu’une bonne partie de ce qui se passe dans le film n’existe en fait que virtuellement, vous aurez sans doute du mal à le croire, vu le niveau assez bluffant de photoréalisme atteint par les effets visuels. Concrètement, lors des scènes spatiales, le seul élément réel est le visage des acteurs.

 

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Pour coller au mieux aux situations rencontrées dans le film, Sandra Bullock et George Clooney ont été filmés sur des supports mobiles, à l’aide de caméras motorisées capables de reproduire les mouvements les plus complexes. Tout le reste, les combinaisons, la visière, mais également tout l’environnement, de la station spatiale à la Terre elle-même, a été entièrement créé par ordinateur. Un challenge particulièrement difficile à relever, d’autant plus que le film comporte des mouvements de caméra assez complexes, mais qui devaient pourtant sembler naturels.

 

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Plus traditionnellement, un système de câbles et de supports assez sophistiqué a été utilisé pour les séquences en apesanteur, puis a été ensuite gommé numériquement. Dans plusieurs plans, certaines parties du corps de Sandra Bullock ont même été reconstituées numériquement.

 

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Enfin, pour recréer au mieux les conditions d’éclairage, l’équipe a construit la Lightbox, un cube tapissé d’écrans LED. En projetant dessus les arrières-plans de l’action, cela permettait de recréer très précisément les conditions d’éclairage sur les acteurs.

 

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