mercredi 31 décembre 2014

The Double

Film de Richard Ayoade (2013), avec Jeff Eisenberg, Mia Wasikowska, Wallace Shawn, Yasmin Paige, Noah Taylor, etc…

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Sorti en catimini cet été, The Double est une nouvelle variation sur un thème qui avait récemment servi dans le Enemy de Denis Villeneuve, sauf que sur le papier, elle paraissait beaucoup plus prometteuse. Ici, la présence du double n'est pas ambigüe, elle est avérée. Il est l'exact contraire d'un héros qui a tous les défauts du monde : timide et effacé jusqu'au malaise, maladroit, soumis. C'est un personnage à la limite de la caricature, auquel Jesse Eisenberg (le geek de Zombieland) campe avec beaucoup de sensibilité.

 

vlcsnap-2014-12-31-18h06m49s92Dans sa première partie, The Double est une petite surprise sur le plan visuel. Situé dans un univers kafkaïen à la Brazil, le design en est très original et impossible à dater. Ca fait penser à la vision rétro du futur qu’on pouvait avoir dans les années 70, genre pop art et formica. Là dessus se greffe une comédie de mœurs pas toujours très finaude, et qui finit par tourner un peu en rond une fois qu’on a compris que le réalisateur va se contenter de jouer sur la timidité excessive de son personnage, sans proposer de véritable point de vue qui permette de dépasser la banale description.

 

 

 

 

vlcsnap-2014-12-31-18h19m04s31Le film trouve un second souffle avec l’arrivée de ce fameux double, mais là encore, on reste dans un système un peu mécanique puisque, de manière très prévisible, cet alter ego est justement capable de faire tout ce à quoi l’autre ne parvient pas. Donc on refait grosso modo la même chose que dans la première partie, mais petit à petit, on s’embourbe dans la paranoïa et le trouble jusqu’à une conclusion finalement assez bateau qui en laissera plus d’un sur sa faim.

 

 

 

 

 

Tiré d’un roman de Dostoïevski, The Double a longtemps été attaché au nom de Polanski, et en effet, par son design visuel, on retrouve à un certain degré l’ambiance anxiogène d’œuvres comme Répulsion ou Le Locataire. Mais la comparaison s’arrête là. Pour pouvoir nous embarquer dans les délires d’un personnage, il faut qu’on éprouve un tant soit peu de sentiments pour lui. A trop vouloir charger la barque, le réalisateur ne suscite ici que de la pitié, et malgré la puissance de son concept, il est incapable de faire décoller son film. Dommage. Restent une belle double performance de Jesse Eisenberg et une direction artistique vraiment inhabituelle.

 

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Maléfique

(Maleficent)

Film de Robert Stromberg (2014), avec Angelina Jolie, Sharlto Copley, Elle Fanning, Sam Riley, Brenton Thwaites, etc…

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Curieuse idée que celle-ci : raconter en live un grand classique de l'animation Disney. Après tout, pourquoi pas ? A une époque où la frontière entre animation et prises de vues réelles devient de plus en plus floue et où les prodiges de la technique autorisent pratiquement tout, c'est un challenge qui se tient. Par contre, comment la jouer quand votre star maison (j'ai nommée Angelina Jolie) veut interpréter une méchante ? C'est tout simple : on réécrit l'histoire !

 

vlcsnap-2014-12-31-15h49m29s102Et on la réécrit tellement que le spectateur est un peu largué au début : est-on oui ou non dans un remake de La Belle au Bois Dormant ? A voir la belle Angelina jouer les Superman en planant telle un chasseur à réaction dans des décors dignes d'Avatar, on se le demanderait presque. Ben oui, vous vous doutez bien qu' il a fallu adapter tout ça parce qu'il était hors de question que la fameuse Maléfique soit aussi méchante que dans le dessin animé.

 

 


 

vlcsnap-2014-12-31-15h47m23s178Donc du coup, on nous a pondu une mignonne petite histoire dans laquelle le personnage est une gentille fée, que la méchanceté des hommes amène à devenir vilaine. Mais pas trop, hein, juste un peu ! Et le sort qu'elle lance sur la Belle, eh ben elle le regrette parce que les deux vont devenir les meilleures amies du monde, et Maléfique quasiment une mère de substitution ! Bonjour le révisionnisme ! Sans pour autant jurer fidélité aux grands classiques, on peut être à tout le moins décontenancé par une telle approche du matériau de base. 

 

 

vlcsnap-2014-12-31-15h56m24s214Parce que du coup, tout est possible, y compris un prologue façon Seigneur des Anneaux avec de grosses batailles en images de synthèse. On se demande ce que ça vient foutre là : rien, en fait, c'est juste pour ratisser un petit peu plus large et se rallier les fans de Peter Jackson. Ca ne mange pas de pain et ça fait toujours bien dans la bande-annonce. Et puis franchement, c'est quoi ce corbeau qui se transforme en humain à tout bout de champ pour faire de l’humour à deux balles ?

 

 

 

vlcsnap-2014-12-31-16h01m57s221Soyons honnêtes : à une ou deux reprises, le film arrive à retrouver la splendeur graphique du dessin animé . La scène où Maléfique jette son sort, avec ses volutes de fumée verte, est plutôt bien fichue et assez impressionnante. Mais pour quelques moments réussis, combien de péripéties pas franchement intéressantes ou de personnages bâclés (les fées, qui ressemblent à des minimoys) ? Même le combat final avec le dragon, pourtant l’un des moments les plus épatants du dessin animé, semble sorti d'un mauvais film d'héroïc fantasy. Quant à Sharlto Copley, pas de bol, le roi qu'il incarne ressemble pratiquement trait pour trait au méchant qu'il jouait dans Elysium. Bonjour la nouveauté !

 

Tout ça pour ça, a-t-on presque envie de dire. En soi, Maléfique n'est pas vraiment un nanar. Elle Fanning, dans le rôle d'Aurore, confirme le talent qu'elle avait révélé dans Super 8, et sur le plan visuel, le film a souvent de la gueule. Mais même si Angelina porte super bien les cornes, l'avalanche d'effets spéciaux ne parvient pas à masquer l'absence réelle de magie qui, ajoutée à un manque cruel d'humour, finit par plomber un film qui était plutôt bien parti. Revoir et corriger d'accord, mais si c’est juste pour empiler sans inspiration des trucs empruntés à droite à gauche, cela ne sert à rien.

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mardi 30 décembre 2014

Breakfast Club

(The Breakfast Club)

Film de John Hughes (1985), avec Emilio Estevez, Molly Ringwald, Judd Nelson, Anthony Michael Hall, Ally Sheddy, etc…

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Là, on parle d'un temps que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaitre, comme le dit la chanson : celui du film d'ados des années 80. Un genre à lui tout seul, symbolisé par un seul et unique réalisateur : John Hughes. La recette est simple : des djeunzs (forcément !), un scénario malin qui sort des sentiers battus et une bande-son qui cartonne. Mais au-delà de la formule, il y a bien évidemment la "Hughes touch", ces personnages si minutieusement décrits qu'ils en deviennent formidablement attachants. C'est un cinéma qui parlait enfin des jeunes sans condescendance, mais avec une grande tendresse.

 

 

vlcsnap-2014-12-08-22h54m22s131On est un peu ému de revoir aujourd'hui The Breakfast Club tant le film n'a pas pris une ride dans la manière dont il décrit et fait vivre ses personnages. La situation de base est simple: cinq ados se retrouvent ensemble en retenue un samedi. Hughes choisit volontairement des archétypes, de style et de classes sociales radicalement opposées : il y a la fille à papa, le sportif, le geek, le rebelle et la chtarbée. Ensemble, ils vont apprendre à se découvrir et à aller au-delà de leurs préjugés.

 

 

 

 

 

vlcsnap-2014-12-08-22h54m44s87Le film démarre comme une comédie d'observation pour virer petit à petit vers l'introspection. Chacun de ces jeunes va remettre en question son univers familial, ses rapports avec les autres, la notion même d'amitié, bref tout ce qui nous préoccupait lorsque nous avions leur âge. La scène finale, remarquable, ressemble même à une thérapie de groupe, chacun abattant ses propres barrières pour se livrer au jugement et au regard des autres.

 

 

 

 

 

vlcsnap-2014-12-21-22h28m37s177Une telle approche ne tiendrait pas une seconde si elle n'était pas sous-tendue par un humour omniprésent. Que ce soit dans la description de ce petit monde ou au travers de dialogues naturels et savoureux, The Breakfast Club affiche clairement une absence totale de prétention qui renforce la spontanéité de l'ensemble. C'est presque une pièce de théâtre sans pour autant paraitre "joué", c'est presque un film psychologique sans pour autant donner l'impression de l'être, toute la clé du succès du film réside dans ce mélange de genres qui fonctionne remarquablement bien.

 

 

 

 

vlcsnap-2014-12-08-22h48m08s222Les acteurs, tous extraordinaires, sont pour beaucoup dans la réussite du film. Même s'ils animent des personnages très typés, ils savent chacun y apporter la petite touche qui saura faire la différence. Il est clair que le naturel du film repose essentiellement sur un gros travail d'acteur. De fait, le casting a presque fonctionné comme une troupe de théâtre durant le tournage, laissant souvent la place à l'improvisation. Grâce à cela, il émane du film une profonde sincérité et un naturel confondant qui en fait tout le prix. Ma préférence ira a Anthony Michael Hall, véritablement émouvant dans le rôle de Brian, le fils de bonne famille, mais tous forment un merveilleux ensemble.

 

 

 

Très européen dans son traitement des personnages et surtout son sens de l’observation et du détail, le film est surtout le triomphe d'un metteur en scène qui, en sacrifiant aux codes du film pour ado, a su imposer un univers et un style qui n'appartiennent qu'à lui. The Breakfast Club, c’est la quintessence du style John Hughes. Cela peut paraitre un peu désuet aujourd’hui, entre le Don’t You Forget About Me des Simple Minds ou la bande-son truffée de rock FM, mais peu de films ont su saisir avec autant de justesse et d’humour la confusion et les questionnements de l’adolescence. Un petit chef d’œuvre.

 

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Le Trombinoscope

Parmi les jeunes talents que le film a révélé, bien peu transformeront l’essai et embraieront sur une carrière prestigieuse. Seul Emilio Estevez tirera un tant soit peu son épingle du jeu, avec une poignée de films au succès modeste (Etroite Surveillance, chroniqué ici) et même quelques essais en tant que réalisateur (The Way, dont on parle ici). Les autres alterneront séries TV et films de série Z, sauf Anthony Michael Hall, qu’on retrouvera dans un ou deux films importants (dont Edward Scissorhands). Quant à Paul Gleason (le proviseur), on le reverra notamment dans Die Hard, où sa performance d’agent du FBI incapable sera remarquée, avant qu’il ne décède prématurément en 2006.


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L’Introduction

Le film s’ouvre sur une citation tirée de la chanson Changes de David Bowie, qui réaffirme la base de l’histoire, à savoir l’incommunicabilité entre parents et enfants. Symboliquement, ces paroles vont comme voler en éclats, comme si on essayait d’abattre cette barrière. L’effet a été obtenu avec une vitre teintée en noir, superposée aux images du lycée. Pour la petite histoire, la citation de Bowie a été suggérée par l’actrice Ally Sheddy.


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Le réalisateur présente ensuite le cadre de l’action, en quelques plans, accompagnés de la voix off de Brian, l’un des personnages, qui lit un texte qui prendra toute sa signification à la fin du film, puisqu’il s’agît du début de la dissertation que réaliseront les personnages. Le décor du lycée est décrit de manière très générique, par des plans de salles vides qui renforcent le sentiment d’isolement que vont éprouver les jeunes dans le film.


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Puis petit à petit, l’accent va être mis sur les individus plutôt que sur le décor. D’abord par le biais de citations griffonnées ou gravées sur des murs, puis ensuite, subtilement, les protagonistes du film sont introduits par les caractéristiques de leur personnalité. Par contre, cela se fait de manière totalement transparente pour le spectateur, puisqu’il ne les connait pas. C’est une manière de préparer inconsciemment le public à une confrontation entre des personnalités très différentes les unes des autres.


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jeudi 18 décembre 2014

Grace de Monaco

Film d’Olivier Dahan (2014), avec Nicole Kidman, Tim Roth, Frank Langella, Parker Posey, Paz Vega, etc…

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A défaut d'avoir fait l'unanimité sur le plan critique (on est loin du compte puisque le film a reçu une volée de bois vert), Grace de Monaco aura au moins causé le scandale, et pour cause. La vie de la princesse Grace est loin d'être le conte de fées qu'on s'imagine, et le film d'Olivier Dahan ne se gêne pas pour la dépeindre comme une femme incomprise en pleine dépression. Autant pour l'icône hitchcockienne. Donc bien évidemment, la famille Grimaldi a fini par crier au scandale et du coup, Grace de Monaco a botté en touche en se présentant comme "une fiction inspirée de faits réels".

 

vlcsnap-2014-12-17-23h07m48s121Franchement, le film méritait il d'être à ce point plombé par la presse ? Non, il y a bien pire, et il possède au moins le mérite d'être porté par la performance de Nicole Kidman. Même si sa ressemblance avec la princesse Grace est plus que relative, on est une fois encore dans une configuration où un impressionnant numéro d'actrice donne une réelle épaisseur au personnage public. Un peu comme dans La Môme, en fait. La mise en scène laisse vivre les émotions, et ça, c’est plutôt bien.

 

 
 

vlcsnap-2014-12-17-23h00m55s30Le réalisateur Olivier Dahan a crié bien fort sur les toits que le film avait fait l'objet d'un bras de fer avec le distributeur américain, les tristement célèbres frères Weinstein. Fort heureusement, il est arrivé à conserver la main sur le montage final, ce qui fait que Grace de Monaco n'est pas tout à fait un biopic bien pensant et balisé. Au contraire, on n'hésite pas à y charger la barque en dépeignant Grace comme une femme hautaine et arrogante, à deux doigts du divorce. On comprend que la famille royale ait moyennement apprécié. Cela dit, tout est vite bouclé en une petite heure et demie de projection, preuve sans doute que la matière n’était pas vraiment suffisante pour alimenter un véritable portrait qui aille au-delà de ce qu’on connait du personnage public.

 

Mais en définitive, malgré ses côtés scandaleux, le film n'oublie pas de faire où on lui dit de faire, s'octroyant au passage des raccourcis un peu énormes (on a du mal à comprendre comment une crise aussi grave que celle qui a opposé la principauté à la France puisse être résolue aussi facilement, un bal et pouf, on n’en parle plus!). Ce qui le sauve, c'est le talent de ses acteurs. Kidman bien sûr, mais aussi Derek Jacobi, Tim Roth et surtout Frank Langella dans le rôle du conseiller spirituel de la princesse. Ce sont eux qui charpentent réellement un film un peu guindé qui se parcourt comme un numéro de Points de Vue ou de Paris Match.

 

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lundi 8 décembre 2014

Prédestination

Film dees frères Spieirig (2014), avec Ethan Hawke, Sarah Snook, Noah Taylor, Madeleine West, Freya Stafford, etc…

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Attention, c’est du  très très lourd ! Prédestination fait partie de cette catégorie de films qui ne payent pas de mine, dans lesquels on se lance un peu à reculons, pour en définitive être intrigué, captivé, puis subjugué. Pourtant, cette petite merveille n’aura même pas eu les honneurs d’une sortie en salles dans notre beau pays, alors que des nanars à gros budget squattent le box-office. Une injustice à réparer pour ce film, auquel on souhaite d’ores et déjà une fantastique carrière en vidéo.

 

vlcsnap-2014-12-07-17h08m47s250A la base, il s’agît d’une intrigue basée sur le voyage dans le temps. Mais pas un trip bien pépère, loin de là. On est davantage ici dans l’univers d’un Philip K. Dick, un monde dans lequel les apparences sont trompeuses, et où la réalité peut déraper à tout moment. Dans ce monde futuriste, des agents sont envoyés dans le passé pour le “rectifier” et prévenir ainsi des catastrophes ou des attentats. C’est la mission du personnage principal, qui se  retrouve projeté dans les seventies dans la peau d’un barman, avec pour mission de neutraliser un dangereux terroriste. S’ensuit une rencontre troublante avec un jeune homme au look androgyne qui va lui raconter son histoire.

 

 

vlcsnap-2014-12-07-17h23m10s152En dire plus serait gâcher le plaisir que vous réservera un scénario à la fois complexe et inattendu, et même si on éprouve un peu de mal à trouver ses marques dans les premières séquences, Prédestination dégage au fur et à mesure de son déroulement une atmosphère envoutante, qui fascine au fur et à mesure que l’histoire dévoile ses tenants et aboutissants. Tout du long, le film s’enrichit d’une fantastique dimension humaine, portée par les performances remarquables d’Ethan Hawke et de Sarah Snook. Les personnages ne sont pas des pions placés par hasard dans une intrigue complexe, leur souffrance et leurs sentiments sont bien réels et donc d’autant plus touchants. C’est une facette supplémentaire mais indispensable, qui fait du film bien plus qu’une simple variation sur un thème de S.F. connu.

 

vlcsnap-2014-12-07-17h11m41s179Des frères Spieirig, qui ont réalisé cette petite perle, on ne connaissait que Daybreakers, un film de vampires passé un peu inaperçu, mais auquel on serait tenté de donner une chance. Avec Prédestination, ils passent carrément à la vitesse supérieure. C’est de la S.F. comme on l’aime, qui manie avec adresse les paradoxes spatio-temporels, avec comme toile de fond une histoire formidablement émouvante et hors des sentiers battus. Il faut s’y laisser prendre par la main, et embarquer jusqu’au vertige d’une conclusion qui se révèle aussi déchirante qu’inattendue.

 

 

C’est donc une merveilleuse surprise que ce Prédestination, le genre de découverte dans lequel on se perd avec bonheur, mais qui sait aussi que ce qui fait vivre et vibrer un film, ce sont ses personnages et son scénario. On comprend un peu qu’une œuvre aussi atypique et hors-normes ait effrayé les distributeurs un peu partout dans le monde (eh oui, la France n’est pas la seule à avoir joué les frileuses!), si l’on en juge par la carrière erratique qu’a connue le film. Il reste donc à espérer qu’il trouve son public, car il le mérite amplement. Sur un sujet somme toute assez proche, il enterre littéralement le récent et très surestimé Looper. Un film culte potentiel, donc, à découvrir toutes affaires cessantes !

 

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dimanche 7 décembre 2014

Lucy

Film de Luc Besson (2014), avec Scarlett Johansson, Morgan Freeman, Amr Waked, Choi Min-Sik, Analeigh Tipton, etc…

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Sur le papier, ca avait toutes les allures de la bonne idée. D'ailleurs, elle avait déjà servi : Limitless, avec Bradley Cooper, ne s'était pas privé de l'exploiter : en gros, une américaine bon teint (c'est la belle Scarlett) est la victime d'une drogue expérimentale qui décuple ses capacités cérébrales. Point de départ d'un thriller délirant dans lequel l'héroïne fait léviter méchants et revolvers, voit à travers les murs, est connectée wifi et se transforme en une sorte de mélasse rouge. Je ne sais pas ce que Besson a pris quand il a écrit son film, mais ça devait être du lourd !

 

vlcsnap-2014-12-03-12h33m28s3En revanche, pas certain qu'il ait utilisé sa drogue miracle pour écrire son scénario, tant tout celà sent bon le fond de tiroir et le cliché. Pourtant court, Lucy met trois plombes à démarrer, se vautrant allègrement au passage dans une violence aussi gratuite qu'excessive. Le réalisateur aurait voulu faire du Tarantino qu'il ne s'y serait pas pris autrement. C'est un véritable festival, sans doute pour rendre le méchant pourtant déjà très méchant encore plus méchant, bref amis de la subtilité, bonjour : c'est carrément l'artillerie lourde, ça gicle et ça cartonne à tire-larigot. On savait déjà que Besson ne faisait pas dans la dentelle, manquait plus qu'il en rajoute dans ce domaine. Bref.

 

 

vlcsnap-2014-12-03-13h36m02s17Mais le plus marrant, c'est sans doute  tout cet amalgame scientifico-philosophique qui enrobe le film. Morgan Freeman, qu'on a connu plus inspiré, nous ressort son personnage de grand sage, et nous explique longuement que finalement, l'homme, même en utilisant un chouïa de ses capacités intellectuelles, c'est tout de même un gros porc qui a bien dégueulassé sa planète. Et c'est parti pour le petit couplet écologiste, à grand renfort d'images flash façon Arthus Bertrand. Accessoirement, on peut se demander ce que ça peut bien venir foutre dans un thriller, si ce n'est que c'est vachement tendance à l’heure actuelle d'être éco-responsable.

 

 

vlcsnap-2014-12-03-12h52m02s133Avec le temps, le cinéma de Luc Besson a perdu ce côté maladroit et parfois un peu pataud qu'on pouvait trouver dans ses premiers films. C'est désormais un style parfaitement huilé mais qui n'a plus le côté bricolo et peu sûr de lui de films comme Nikita ou Le Dernier Combat, qui malgré l'ambition de leurs scénarii, gardaient grâce à celà une certaine innocence. Là, c'est du cinoche à l'américaine, où tout est sacrifié à l'efficacité et dans lequel on serait bien en peine de trouver une quelconque thématique personnelle. En clair, c’est niais et con-con, ça va vite et ça tape fort : c’est le cahier des charges type d’une production Besson, quoi !

 

 

L’ami Luc, il s'en fout à vrai dire, même si sur la fin, Lucy prend un virage philosophico-mystique avec une séquence tellement énorme dans son concept qu'elle oscille entre le culot et le ridicule. Après 90 minutes d'action speedée et bourrine, terminer sur un trip vers les origines de l'homme digne de 2001 ou de The Tree of Life, il fallait oser. Le public, par contre, en particulier celui qui se délecte des gunfights à la Matrix, ou qui trouve trop cool que la Scarlett colle les méchants au plafond, le public, disais-je, pas certain qu’il y trouve son compte, mais bon, après tout, il en faut pour tout le monde. 

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