jeudi 14 décembre 2017

Instinct de Survie

(The Shallows)

Film de Jaume Collet-Serra (2017), avec Blake Lively, Oscar Jaenada, Sedona Legge, Brett Cullen, Chelsea Moody, etc…

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Comme le savent bien les lecteurs de ce magnifique blog, Jaws est insurpassable dans ce sous-genre qu’est le “film de requins”. Si on voulait taquiner la frange de cinéphiles purs et durs, on pourrait même dire qu’il est insurpassable en matière de cinéma tout court, mais bon, ça, c’est une autre histoire. Toujours est-il que lorsque ce The Shallows a débarqué avec sa réputation de thriller top moumoute avec un requin dedans, le Strapontin ne pouvait que douter du potentiel de ce petit film venu de nulle part, qui osait venir chasser sur les terres de tonton Spielberg.


 

vlcsnap-2017-12-12-22h06m20s129En plus, comme par chez nous, on aime bien vérifier les étiquettes avant d’acheter, on ne pouvait ignorer que le réalisateur n’était autre que Jaume Collet-Serra. Outre son patronyme qui évoque volontiers des danses lascives au bord de la plage, le bonhomme est aussi l’auteur du fameux Non-Stop, dans lequel Liam Neeson traquait un terroriste dans un avion à grands coups de SMS. Un film qui commençait plutôt bien, pour se terminer dans le n’importe quoi le plus absolu (la chronique est d’ailleurs dispo ici sur votre blog favori). Bref, comme on dit sur le bord de mer, drapeau orange et vigilance requise.



vlcsnap-2017-06-16-14h07m48s71Finalement, on va dire que ce thriller balnéaire s’en sort plutôt bien, mieux que le machin avec Liam Neeson qui se croyait obligé de faire du Taken. Le film mélange les genres et reprend plusieurs ingrédients à droite à gauche, c’est entendu. C’est autant un survival movie qu’un film d’action, on y fait un petit clin d’oeil à Seul au Monde, en remplaçant le ballon Winston par une mouette. Avec, bien entendu, les obligatoires flashbacks qui nous expliquent comment l’héroïne a abouti sur cette plage, etc, etc. Et comme on ne se refait pas, Collet-Serra nous ressort ses petites incrustations de SMS  ou de chronomètres, ça fait plus branché et ça nous épargne, mine de rien, une scène explicative en plus.



vlcsnap-2017-12-12-21h55m32s34Juste histoire de bien enfoncer le clou, le requin va bouffer un surfeur (et pas qu’à moitié, bel effet gore garanti). Après, c’est un enchaînement de situations dans lesquelles la jeune héroïne va risquer sa vie : pour fuir un rocher menacé d’engloutissement par la marée, pour récupérer la go-pro du surfeur qui a fini en sushi, pour atteindre la bouée. Bref, autant de micro-séquences à suspense qui étoffent l’histoire, tout en gardant le squale pas trop en vue. Sur ce plan, le réalisateur a bien retenu la leçon de Spielberg et n’abuse pas des effets de synthèse pour montrer la bête. La peur vient davantage des dégâts qu’elle cause, et c’est plutôt une bonne chose.



vlcsnap-2017-06-16-14h10m52s120Bon, bien sûr, dans la dernière ligne droite, on y va à fond, sans s’embarrasser de la crédibilité. C’est normal, même le brave Steven a fait pareil. Donc Jaime Collet-Serra y va franco, mais sans pour autant verser dans la surenchère. En soi, l’astuce pour éliminer le requin est un peu crétine, mais peu importe, celle de Jaws l’était toute autant. L’important, c’est que la logique du spectacle et du feu d’artifice final soit respectée sans trop en faire, et il faut reconnaître que sur le plan, The Shallows sait rester dans les clous et ça, c’est plutôt bien.




Donc à une époque de blockbusters hypertrophiés, ce petit suspense ne cherche ni à marcher dans les traces de son prestigieux prédécesseur, ni à en faire des caisses histoire d’en mettre plein les mirettes. Constamment lisible, bien construit et prenant, The Shallows est un exemple de thriller réussi, dont l’efficacité n’a d’égale que la concision. Plongez !



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jeudi 7 décembre 2017

Alliés

(Allied)

Film de Robert Zemeckis (2016), avec Brad Pitt, Marion Cotillard, Lizzy Caplan, Jared Harris, Matthew Goode, etc…

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Décidément, Robert Zemeckis n’est jamais où on l’attend. Après le suprenant The Walk, le voilà qui s’attaque à un bon vieux mélo des familles, avec des têtes d’affiche top moumoute, bref pas vraiment le projet sur lequel on l’imaginait. Car en définitive, ce que le grand public retiendra de cet Allied, c’est davantage le fait que le beau Brad ait pulvérisé son mariage en roucoulant avec Marion Cotillard, plutôt que le film lui-même. Parce que, pour être honnête, Allied ne révolutionne vraiment pas la filmographie du réalisateur.

vlcsnap-2017-06-14-14h51m50s76A une époque où les trois-quarts des films se font sur des études de marché, en visant des cœurs de cible bien précis, on est un peu surpris que les grands studios aient misé sur ce retour au grand film d’aventures romanesque. D’autant plus qu’un metteur en scène comme Paul Verhoeven lui avait  récemment filé un sacré coup de fouet avec son excellent Black Book. Donc voir Brad et Marion jouer les espions pendant la guerre, ça laissait un peu songeur quant au contenu.

 


 

vlcsnap-2017-06-14-14h58m10s20Et effectivement, il ne faut pas s’attendre à un feu d’artifice de ce côté-là, mais plutôt à un défilé de toutes les figures imposées du genre. Mission secrète, histoire d’amour contrariée, trahison : tous les ingrédients sont au rendez-vous, mais la mayonnaise a du mal à prendre. Pitt et Cotillard ne sont pas franchement mauvais, la mise en scène de Zemeckis non plus, mais on a l’impression que le film est plus préoccupé à suivre un schéma et à fabriquer du mélo qu’à faire naître une véritable émotion. Les personnages ne sont ni plus ni moins que des stéréotypes dans ce qui se voudrait une recréation des grands classiques façon Casablanca.

 

 

vlcsnap-2017-06-14-14h54m09s183Bien évidemment, Zemeckis ne loupe pas une occasion de s’imposer des défis techniques, on le connaît trop bien pour ça. Ici, en l’occurrence, c’est une scène d’amour dans une voiture, avec un travelling circulaire autour de nos deux tourtereaux. En temps normal, une scène pareille aurait mis le feu, elle aurait apporté au contenu romanesque du film. Ici, elle ne fait que renforcer la platitude et le côté fabriqué du reste, car on sent bien, malgré l’habileté des effets spéciaux, que tout cela a été pas mal bidouillé en post-production.

 

 

 

vlcsnap-2017-06-14-15h00m31s168Dans un mélo flamboyant, cela n’aurait pas été gênant, car quelque part, cet aspect artificiel serait devenu une composante du spectacle. Sauf que là, entre jeunes premiers un peu coincés et péripéties pas vraiment palpitantes, l’étincelle a du mal à jaillir. Dans sa seconde partie, Allied mise sur le suspense et rebat les cartes pour nous intéresser un tant soit peu aux personnages, mais c’est un peu tard. On ne s’est pas vraiment attachés à eux avant, donc mis à part fournir la matière à une conclusion pernicieuse, ce n’est certainement pas cet ultime rebondissement qui fera décoller le film.

 

 

C’est vraiment dommage, car Zemeckis est quand même un des rares anciens à pratiquer un cinéma à la Spielberg, qui respecte une certaine approche de la mise en scène sans se vautrer dans les tics des gros films actuels. C’est un plaisir, par exemple, de pouvoir profiter d’une partition musicale décente et adaptée, même si Alan Silvestri a fait bien mieux auparavant. C’est ce savoir-faire qui, en définitive, sauve les meubles dans Allied et en fait un spectacle agréable, à la place du mélo passionné qu’il aurait voulu être.

 

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