mercredi 29 novembre 2017

Le Casse

Film d’Henri Verneuil (1971), avec Jean-Paul Belmondo, Omar Sharif, Dyan Cannon, Robert Hossein, Nicole Calfan, etc…

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Quand j’avais 10 ans, Bébel était mon héros, et ce n’est pas sans une pointe de nostalgie que je me souviens de l’époque de la sortie du Casse. Je ne sais plus très bien ce qui avait motivé cet engouement pour notre star nationale, mais tout ce que je peux dire, c’est que j’ai sérieusement empoisonnée la vie de mon entourage avec ce fichu film. Je tiens donc à rendre hommage à la patience de mes parents qui ont mangé du Casse à toutes les sauces, ingurgité la musique de Morricone à hautes doses et ont été obligés d’aller voir le film en salles le soir même de sa sortie. Voilà, c’est dit.


vlcsnap-2017-12-02-23h17m40s8Donc, forcément, à revoir le film aujourd’hui, je m’en veux un peu d’avoir infligé à mes proches un tel bourrage de crâne, et ceci d’autant plus que Le Casse est loin d’être, non pas un chef d’œuvre, encore moins une date dans l’histoire du cinéma. C’est même, il faut bien l’admettre, l’un des moins bons films d’Henri Verneuil. Donc tout ça pour ça. On peut dire que la machine publicitaire avait, à l’époque, parfaitement rempli son rôle en transformant en évènement un polar plutôt banal.




vlcsnap-2017-12-02-23h11m12s233Car on ne peut pas vraiment dire que Le Casse innove particulièrement. Au contraire, il est tout entier organisé autour de sa star, au gré d’un scénario pas vraiment palpitant. Pourtant, Verneuil n’a pas tapé n’importe où. Le film adapte en effet un roman ultra-noir de David Goodis, dont on ne peut pas dire qu’il reste grand’chose dans le produit final. Pratiquement rien, en fait. L’odyssée nihiliste de petits braqueurs minables se transforme en cambriolage hi-tech,assaisonné de poursuites à pied ou en voiture dans les rues d’Athènes.




vlcsnap-2017-12-02-23h18m54s174Dans un sens, Belmondo remplit pleinement son contrat et se donne à fond. On est encore estomaqué par cette cascade invraisemblable qui le voit dévaler une pente vertigineuse au beau milieu de gravats énormes qui le loupent d’un poil. Ca ne sert pas vraiment le film, mais c’est finalement grâce à des moments comme celui-ci que Le Casse s’est bâti sa réputation. Rémy Julienne et son équipe mettent les petits plats dans les grands pour une poursuite en voiture échevelée, dont on sent à chaque instant qu’elle essaie de surpasser ce qui pouvait se faire de mieux à l’époque.




vlcsnap-2017-12-02-23h13m16s170L’intrigue, quant à elle, paraît bien mince. Omar Sharif joue plutôt bien les flics ripoux, même si on ne le sent pas complètement à son aise dans son personnage. Son face-à-face avec la gouaille insolente de Bébel donne les meilleures scènes du film, bien qu’on déplore, là encore, l’absence d’un Audiard au travers de dialogues assez convenus. Le film s’autorise aussi quelques légers dérapages érotiques parfaitement gratuits qui paraissent aujourd’hui particulièrement datés et ridicules. Pas de commentaire sur la prestation gentiment nulle et carrément potiche de Dyan Cannon, dont on se demande encore comment elle a pu faire carrière.



vlcsnap-2017-12-02-23h07m57s56En bout de course, le bilan est donc plutôt mince. Le film assure juste le minimum syndical en matière de scénario, et devient vite un prétexte pour enquiller toute une ribambelle de séquences d’action. La réalisation de Verneuil est carrée mais impersonnelle, elle met parfaitement en valeur les exploits sportifs de son héros, au détriment de la crédibilité d’ensemble. Le Casse finit par ressembler à une énorme bande dessinée, tant tout y est caricatural, en particulier ce cambriolage, le fameux “casse” du titre, dont l’attirail technologique de pointe vous vaudra certainement un bon moment de rigolade. Bien davantage d’ailleurs que les quelques apartés comiques qui tombent, eux, complètement à plat.



Mais bon, il y a des choses qui ne se commandent pas. N’importe quel admirateur de Morricone vous dira que sa musique compte parmi ses plus médiocres, il n’empêche que ses accords marqués au piano, sur fond de générique stylisé à l’américaine, me chatouillent encore l’épine dorsale. Donc même si Le Casse n’est en fait qu’un polar très conventionnel tout à la gloire de notre Bébel national, certains souvenirs ont la vie dure. Il m’est donc difficile d’être complètement objectif au sujet d’un film qui a, à sa manière, compté dans ma vie de cinéphile. Même si, en l’occurrence, les souvenirs qui l’entourent ont davantage de prix que le film lui-même.


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Le Générique

On ne parle pas assez souvent des créateurs de génériques français et c’est injuste. Car même si leur travail n’égale pas celui d’un génie comme Saül Bass, il existe tout de même des artistes qui ont apporté leur touche personnelle à bien des films. Michel François et sa compagnie, fort justement baptisée … les Films Michel François, a ainsi collaboré avec Truffaut, Tati, Verneuil ou Oury. Je peux même dire que ses créations ont fait partie de mon enfance de spectateur. Des créations qui peuvent paraître simples à réaliser à l’heure actuelle, mais qui, à l’époque, nécessitaient un travail monstrueux sur les incrustations, animations et autres effets visuels, qui n’étaient pas encore très en vogue en France.


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Le principe du générique du Casse est simple : une image teintée en rouge sur laquelle se découpe un rond, tel le viseur d’une arme à feu. Ca donne un petit côté James Bond à une ouverture plutôt dépouillée et merveilleusement rythmée par la musique de Morricone. A noter que le générique repend le logo du titre tel qu’il apparaît sur l’affiche, créée par le fameux René Ferracci.


La Version Américaine

vlcsnap-2017-12-01-23h09m44s73Et oui, cela peut paraître surprenant, mais à la fin des années 60, plusieurs films bien de chez nous ont été tournés simultanément en anglais. Attention, pas simplement doublés in english, mais carrément tournés dans la langue de Shakespeare, dans le but de mieux se vendre à l’international. Des films comme La Piscine, Le Clan des Siciliens ou Le Cerveau existent donc dans une version américaine, comme l’explique le documentaliste Jérôme Wybon dans les bonus du récent blu-ray. Et l’un des suppléments les plus intéressants de cette nouvelle édition, c’est justement la présentation de ce montage U.S., qui présente quelques petites différences avec l’original.



vlcsnap-2017-12-03-18h42m47s53D’abord, ce n’est pas Belmondo qui apparaît en premier au générique, mais Omar Sharif. Ensuite, la poursuite de voitures est raccourcie de quelques plans. Enfin, le final dans le silo à grains est monté différemment, et on zappe (à raison) le gag final (raté) avec le poulet. Il est également à noter que notre Bébél national est doublé par un autre comédien, son accent américain n’étant pas suffisamment bon pour les besoins du film (on voit d’ailleurs dans les suppléments un comparatif entre sa vraie voix et la voix doublée).





Le Blu-Ray

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Le Casse était l’un des titres les plus mal servis de la filmo de Belmondo en matière de DVD, avec un transfert pas terrible qui datait de Mathusalem. L’éditeur L’Atelier d’Images a eu la bonne idée de lancer une opération de financement participatif sur internet pour monter son projet. Et le fait est que cela a plutôt bien marché, puisqu’il est parvenu très vite à réunir les fonds pour cette belle édition collector. Sans vouloir faire dans l’avalanche de bonus, Le Casse propose quelques petites raretés, comme un reportage de la télévision belge sur le tournage du film, qui propose de nombreuses images du tournage et des interviews avec Verneuil et ses acteurs.





Il y a également le montage américain du film, ainsi qu’un comparatif entre les deux versions. La cerise sur le gâteau, c’est une interview du chef cascadeur Rémy Julienne, qui revient sur les nombreuses poursuites et les exploits sportifs - parfois insensés - de Belmondo. La qualité de transfert est également au rendez-vous, il y a même, en bonus, une adaptation en B.D. assez curieuse. Bref, voici un éditeur à suivre avec attention et une édition hautement recommandable, même si le film en lui-même l’est beaucoup moins.


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