Film de John Madden (2017), avec Jessica Chastain, Mark Ford, Sam Waterston, Alison Pill, John Lithgow, etc…
Curieux de voir Luc Besson et sa compagnie Europa derrière tout ça. Enfin, curieux mais rassurant quand même. Ca prouve que l’auteur du Grand Bleu sort de temps en temps de sa ligne éditoriale et qu’il peut produire autre chose que des nanars pleins de baston et de grosses voitures. Miss Sloane, c’est le type même du film dénonciateur, qui entend démonter le fonctionnement aberrant de certaines institutions américaines. Ici, en l’occurrence, ce sont les groupes de pression, ces fameux lobbies qui font et défont les élections et les votes de loi.
Un sujet tellement riche et passionnant qu’on se demande bien pourquoi il n’a pas été abordé plus tôt au cinéma. Car finalement, si on y regarde bien, vous avez tous les ingrédients d’un bon thriller : des intrigues, des manipulations, du suspense. Avec en prime de quoi jouer sur l’indignation du spectateur, quand le sujet touche l’émotion, comme dans le cas du débat sur les armes à feu. C’est aussi le moyen d’en apprendre un peu plus sur le pourquoi du comment, et sur ce plan, Miss Sloane est plutôt instructif, même si on se doute que tout cela est dépeint à grands traits et avec beaucoup de simplification.
On se doute également que ça ne va pas être l’extase en matière de mise en scène. John Madden est un réalisateur appliqué, dont les films sont gentiment incolores. A part le multi-oscarisé Shakespeare In Love, on ne peut pas dire que sa filmographie brille par sa personnalité. Mais tant mieux, finalement, car on sait d’avance que dans des films comme ceux-là, il s’agît avant tout de raconter une histoire et pas de l’agrémenter de touches à soi, même si, quelque part, cela ferait un petit peu respirer le genre. Mais bon, on s’égare. Madden reste dans les clous, c’est bien pour le sujet.
Ca l’est d’autant plus que Miss Sloane fait partie de ce genre de films où l’on n’a pas intérêt à relâcher son attention, sous peine d’être largué vite fait. Heureusement, le film ne s’inscrit pas dans la lignée des drames boursiers façon Margin Call ou The Big Short. Mieux, Madden simplifie à outrance, mais fait surtout filer tout ça à toute allure, à tel point que le film finit par ressembler à son héroïne, une sorte de Terminator en jupons capable de manipuler l’opinion comme elle le désire. Mais ceci dit, on évite d’aller trop loin dans la provoc puisque cette wonder woman des groupes de pression n’adopte jamais des positions trop extrêmes.
Jessica Chastain incarne avec beaucoup de talent ce personnage atypique, et la froideur de l’actrice sert ce personnage sans attaches, qui ne vit que pour son parcours professionnel. Le film creuse sa personnalité juste assez pour nous faire comprendre que justement il n’y a rien à creuser, et qu’en définitive, le panier de crabes dans lequel elle évolue ne vaut pas mieux. On plonge donc allègrement dans les manipulations en tout genre qui démolissent l’intégrité des personnages, et Miss Sloane y perd en crédibilité ce qu’il y gagne en efficacité dramatique.
Mais néanmoins, l’ensemble est si bien ficelé qu’on se laisse volontiers prendre à ce jeu de dupes. Miss Sloane, sous couvert de dénoncer le système, reste fidèle à une tradition de cinéma de divertissement, de film à thèse bien Hollywoodien, avec les acteurs qui vont bien (un Mark Ford surprenant, un John Lithgow et un Sam Waterston fidèles à eux-mêmes) et le savoir-faire invisible qu’il faut. Pas révolutionnaire donc, on s’en serait douté, mais conforme à ce qu’on peut en attendre.
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