jeudi 28 février 2013

Skyfall

Film de Sam Mendes (2012), avec Daniel Craig, Javier Bardem, Judi Dench, Ralph Fiennes, Albert Finney, etc...












 



La saga Bond, c'est quand même quelque chose d'assez particulier. Inévitablement, tout cinéphile qui se respecte possède sa petite madeleine dans la série, et forcément ça invite à l'indulgence. Bond (enfin, soyons juste, les Bond girls surtout), ça a taquiné les hormones des adolescents que nous étions. Bref, Bond, c'est un truc de mec. Dans le parcours du mordu de ciné ado, on y vient généralement après les Disney, et c'est quasiment devenu une institution. Diantre! Quelle série peut aujourd'hui se vanter d'afficher 50 ans et 23 films au compteur ? C'est pas rien! Ian Fleming était certainement à des lieues de se douter que son héros de roman allait devenir une véritable icône.


En fait, plus qu'une série, Bond c'est une franchise, que ses créateurs, la société Eon Productions, font évoluer bon an mal an, avec quelques petits loupés par-ci par-là. On se souvient encore de l'approche pépère d'Albert Broccoli, un des pères fondateurs de la saga, puis des différents relookings que cette dernière aura subi. Mais bon, il faut tout de même être honnête: la série a été souvent trahie par ses réalisateurs. Les premiers opus, signés par de gentils tâcherons (Terence Young, Lewis Gilbert) ne brillaient pas par leur style, et la production avait joué la sécurité en confiant les derniers à des réalisateurs à l'aise dans l'action (Martin Campbell, Lee Tamahori).

Aussi, surprise de constater que pour ce dernier épisode, on soit allé chercher quelqu'un comme Sam Mendes. Mendes, c'est Américan Beauty, Jarhead, Les Noces Rebelles ... un univers qui n'a carrément rien à voir avec l'agent 007. La curiosité était donc de mise pour ce Skyfall, et ceci d'autant plus que le précédent, Quantum of Solace, était probablement un des plus mauvais films de la série. Alors que tout le monde avait salué avec Casino Royale la renaissance du mythe Bond, Mark Forster avait carrément ramené la série au niveau zéro.


Skyfall devait donc sacrément surprendre pour convaincre. Et il faut avouer que le résultat, s'il ne paraît pas aussi novateur qu'un Casino Royale, est tout de même bigrement réussi. Pourtant, assez paradoxalement, le film fait tout pour se démarquer des éléments clés de la série: assez peu d'action, pratiquement pas de parenthèses touristiques. Le super agent secret est ramené tout en bas de l'échelle, il n'est plus aussi en forme qu'avant et échoue même à ses tests de remise en service. Quant a Q, le pourvoyeur de gadgets, ce n'est plus un vieillard malicieux mais un simple geek, qui lui remet en tout et pour tout... un revolver! Plus dépouillé, tu meurs!


Cette remise à plat des fondamentaux de la série est tellement excessive que passé le pré-générique musclé, on se demande vraiment comment le film va fonctionner. En fait, le truc c'est que Skyfall est davantage un vrai film d'espionnage qu'un véritable James Bond. Déjà, sur le plan esthétique, la remarquable photographie de Roger Deakins change carrément la donne. A la fois stylée et originale, elle se démarque radicalement des cadrages pantouflards auxquels nous a habitués la série. Enfin, la séquence de fusillade dans la maison familiale évoque plus volontiers le souvenir des Chiens de Paille de Peckinpah que les cabrioles qui ont fait les beaux jours de l'agent 007.


Seule concession au passé, le scénario, toujours immanquablement signé par le tandem Neil Purvis/Robert Wade, et qui est vraiment le point faible du film. Puisqu'on était dans une telle logique de renouvellement, pourquoi ne pas avoir aussi fait le ménage dans ce domaine-là ? C'est le cinquième film de la saga qu'ils co-signent, et pas toujours avec une très grande originalité. Quitte à refaire la déco, il serait peut-être temps d'injecter un peau de sang neuf dans un des ingrédients les plus importants de la série.




En dépit de cela, Skyfall est une étape plutôt brillante dans l'évolution de la franchise. Mendes n'y a pas vraiment imprimé son style, mais il n'a pas non plus fourni un boulot de tâcheron. L'émotion est au rendez-vous, Bond y gagne un petit peu plus d'épaisseur, et on y introduit en douceur de nouveaux personnages-clés, qui permettront certainement à la saga de rebondir (sans mauvais jeu de mot!) pour une nouvelle génération. Skyfall ou comment se réinventer en douceur, sans pour autant laisser le spectateur et les fans sur le bas-côté. Bien joué, 007!



Le Trombi:
De nouveaux visages dans la saga Bond pour ce 23ème opus. La plus grosse surprise, c'est Ralph Fiennes qui, mine de rien, a réussi après Harry Potter l'exploit de se caser dans deux des franchises les plus rentables qui soient à l'heure actuelle! Ben Whishaw, dans le rôle de Q, tenait il y a quelques années le rôle principal du Parfum. On est aussi bien contents de revoir Albert Finney dans un rôle savoureux. Enfin, si le visage de Rory Kinnear vous dit quelque chose, c'est normal: son père Roy Kinnear fût l'un des seconds rôles les plus populaires du cinéma anglais.

Daniel Craig
Javier Bardem
Judi Dench
Albert Finney
Ralph Fiennes
Ben Whishaw
Rory Kinnear
Naomie Harris
Le Générique:
C'est toujours un moment privilégié dans la série. Finis les collages pop-art de Maurice Binder, depuis l'évolution des images de synthèse, la conception des génériques a fait un énorme bond en avant, ce qui a donné des résultats plus ou moins heureux. Le générique de Skyfall est une petite merveille qui laisse tomber le côté trop lisse et synthétique de l'animation par ordinateur et crée une séquence onirique qui résume brillamment le film. Porté par la très "bondienne" chanson d'Adèle, il se classe sans mal parmi les plus belles réussites de la saga.


La Photographie:
Plutôt surprenant de voir le chef opérateur des frères Coen au générique d'un James Bond! C'est clairement grâce à Sam Mendes, avec qui il avait travaillé sur Jarhead et Revolutionary Road, que Roger Deakins a été choisi pour la photographie de Skyfall. Et c'est une excellente chose, car cela apporte un plus non négligeable au film, tant au niveau de l'atmosphère que de l'esthétisme. Passant avec habileté des tons chauds du pré-générique à la froideur des souterrains du MI6, Deakins prouve, s'il en était encore besoin qu'il est l'un des meilleurs directeurs photo actuels. La diversité de l'intrigue lui permet de jouer sur une palette assez impressionnante, qui achève de faire de Skyfall le film le plus impressionnant de la série sur le plan visuel.


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