(Falling Down)
Film de Joel Schumacher (1993), avec Michael Douglas, Robert Duvall, Barbara Hershey, Tuesday Weld, etc.
Un homme coincé dans sa voiture pendant un embouteillage. C’est le point de départ d’un des films les plus atypiques des années 90, Falling Down. L’itinéraire à la fois drôle et tragique d’un personnage « en guerre contre la société » (c’est le slogan français du film) qui ne cherche qu’une seule chose : revoir sa fille le jour de son anniversaire.
C’est toujours une petite surprise quand un metteur en scène plutôt moyen accouche subitement d’une belle réussite. Joel Schumacher n’a pas grand’chose pour lui : c’est un tâcheron habile, capable tout aussi bien de vous torcher un Batman (l’imbuvable Batman Forever) qu’un thriller mou du genou comme 8 mm, bref pas le gars dont on attend a priori qu’il révolutionne l’histoire du cinéma.
D’où la surprise que provoque ce Falling Down : c’est à la fois une charge hargneuse et comique contre la société, un manifeste social, une comédie de mœurs, un drame psychologique… Réussite toute relative tout de même : ce n’est pas grâce à la réalisation appliquée de Schumacher que le film réussit, mais uniquement par la force de son scénario et la puissance de ses interprètes.
Au premier degré, Falling Down provoque un plaisir jubilatoire. Il faut voir Michael Douglas pêter les plombs et se déchaîner contre les petits travers de la vie quotidienne. Lorsqu’il attaque un chantier au bazooka ou qu’il brandit une mitraillette contre des employés de fast-food stupides, il part en guerre contre l’injustice et la bêtise comme nous souhaiterions parfois le faire dans notre vie de tous les jours. Dans ces moments de grâce, le film se lâche complètement, et se met au diapason de son (excellent) script.
Le scénario de Ebbe Roe Smith est très intelligent, dans le sens où il ne nous dévoile que progressivement ce qui pousse D-Fens, le personnage principal, à agir comme il le fait. En parallèle, un inspecteur de police vieillissant, à la veille de la retraite (splendide Robert Duvall), trouvera comme une nouvelle raison de vivre à travers cette enquête. Les deux personnages possèdent chacun des blessures intérieures, et le film nous montre avec beaucoup de finesse ces petits détails qui les lient. Et puis, une fois n’est pas coutume, Falling Down met aussi en scène une certaine Amérique, qui n’est plus aussi sûre de ses propres valeurs. Bien sûr, la critique sociale est juste esquissée, mais elle l’est avec suffisamment de conviction pour nous amener à réfléchir.
Le vrai vainqueur du film, c’est Michael Douglas. Je dois le dire honnêtement, il ne m’avait jamais convaincu jusqu’à présent, à une ou deux exceptions près. J’ai toujours trouvé sa personnalité trop lisse, limite opaque : on a l’impression d’un jeu trop «contenu», qui ne se laisse pas assez aller. Le personnage de D-Fens exploite dans un premier temps ce côté un peu figé de sa façon de jouer, mais dès que le scénario lui laisse la bride sur le cou, c’est un véritable festival !
Il sait aussi magnifiquement manier l’émotion, comme dans la scène où il annonce à son ex-femme que son retour est inéluctable parce qu’il a « dépassé le point de non-retour ». C’est un moment très beau, baigné dans une lumière bleue irréelle, où son interprétation est magnifiquement complétée par la musique mélancolique de James Newton-Howard. A travers ce personnage de rebelle, Michael Douglas évoque plus d’une fois les personnages atypiques que son père Kirk pouvait jadis tenir.
Porté par des dialogues crépitants et des situations pittoresques, Falling Down ne souffre en définitive pas trop de sa réalisation impersonnelle. Il faut porter au crédit de Schumacher l’habileté avec laquelle il fait déraper la satire sociale vers l’émotion. Quand Douglas s’étonne à la fin du film, « c’est moi le méchant ? », il parle au nom de tous les laissés pour compte que l’Amérique a laissé sur le bas-côté parce qu’ils n’étaient pas « économiquement viables ». Pas un grand film, mais un film très fort.
Le Trombinoscope
Une fois n'est pas coutume, beaucoup de monde dans le trombi cette fois-ci, et pour cause, puisqu'il s'agît d'un film d'acteurs. Outre Michael Douglas, mentions spéciales à Robert Duvall, dont le jeu nuancé et chaleureux fait des merveilles ici, à Frederic Forrest qui surjoue à mort dans le rôle d'un gros faf néo-nazi, et Raymond J. Barry, qui compose un chef de la police parfaitement détestable. Enfin, Rachel Ticotin partageait la vedette de Total Recall avec Schwarzie.
Michael Douglas |
Robert Duvall |
Barbara Hershey |
Tuesday Weld |
Rachel Ticotin |
Frederic Forrest |
Lois Smith |
Michael Paul Chan |
Raymond J. Barry |
Wow, ça fait longtemps que je ne l'ai pas vu, ce film... Mais j'en garde une bonne impression.
RépondreSupprimerEn fait, c'est parti d'une discussion au McDo avec Christine: elle disait que son sandwich ne ressemblait pas à celui de la photo, et puis ça a dérapé sur "tu te souviens du film où Michael Douglas pête un cable dans un fast-food?". Et puis hop, re-vision le soir même! La qualité du DVD est franchement pas terrible, ceci dit.
RépondreSupprimerLe transfert a été mal fait ?
RépondreSupprimerun film que j'avais adoré !
RépondreSupprimer@ Nicolas: il s'agit de la toute première édition DVD, donc pas top au niveau image. Il a été réédité depuis en édition pseudo-collector.
RépondreSupprimer@ Christophe: Ben finalement, on a un peu les mêmes goûts, non ? Enfin, sauf pour Terminator Renaissance! lol
" Hey ! Tu essayes de me tuer avec une balle de golf ?"
RépondreSupprimerC'est vrai qu'il est génial, on a rarement vu une escalade de violence aussi humaine, il faudra vraiment que je le revoie, j'étais petit quand je l'ai vu mais j'en garde un super souvenir =)
Ah oui! La scène sur le terrain de golf! Excellente!
RépondreSupprimerCe que j'aime dans ce film c'est la logique du passage à l'acte. Licencié depuis des mois, le personnage ment à son entourage et fait semblant d'aller au boulot tous les jours. Il gère assez bien cette routine. Sauf que ce jour là, l'accumulation de contrariétés va le faire basculer. La scène dans la voiture est géniale... la chaleur, la climatisation en panne, les bouchons, les grimaces des enfants dans le bus scolaire... tout cela, D-Fens gère mais on sent le stress monter. Mais ce matin là, il y a cette insignifiante abeille qu il n'arrive pas à tuer avec son journal... et c est l'étincelle qui met le feu aux poudres. Dans la vraie vie, c'est la même chose. On gere les contrariétés de la vie 99,9% du temps et un jour, un détail annodin, peut vous faire basculer vers la folie ou la violence...
RépondreSupprimerOn retrouve cette logique d'escalade vers le "petage de plombs" et le passage a l'acte dans les courts metrages des " nouveaux sauvages" du réalisateur argentin Damián Szifrón.