vendredi 28 octobre 2011

Gainsbourg, Vie Héroïque

Film de Joann Sfar (2010), avec Eric Elmosnino, Lucy Gordon, Laetitia Casta, Doug Gordon, Mylène Jampanoï, etc..

La biographie filmée (ou biopic, en anglais dans le texte), c’est toujours un peu casse-gueule, et rares sont les vraies réussites dans le genre. Outre l’aspect anecdotique (« Ah, tiens, machin il était accro à la coke »), cinématographiquement parlant, ça n’est jamais bien extraordinaire. C’est pensé, calibré pour le grand public, et du coup, il n’y a pas beaucoup de marge pour une œuvre personnelle. Or justement, s’il y a bien un domaine dans lequel ce Gainsbourg, Vie Héroïque se démarque, c’est dans le ton très particulier de sa mise en scène. D’ailleurs, le réalisateur Joann Sfar annonce clairement la couleur : ce n’est pas « un film de … », c’est « un conte de … ». Et en effet, il ne faut pas chercher le réalisme et se laisser entraîner dans un périple en forme de rêve de gosse. C’est très déconcertant, mais finalement assez plaisant une fois qu’on a trouvé ses marques. Le seul problème, et il est de taille, c’est que, tout séduisant qu’il soit, cette rêverie n’a pas grand’chose à voir avec le personnage de Gainsbourg.

Pour les gens de la génération du Strapontin, Gainsbourg, c’était une image sulfureuse, décadente, quelqu’un qui n’hésitait pas à ruer dans les brancards et qui était complètement incontrôlable. Lorsqu’il était invité sur un plateau de télé, tout était possible, et le zapping s’en souvient encore avec des épisodes marquants comme le billet de 500 francs ou son « I want to fuck you » à Whitney Houston chez Drucker ! Outre cette provocation, Gainsbourg adorait jouer avec les interdits, c’était vraiment un artiste hardcore dans tous les sens du terme. Joann Sfar, le réalisateur, a délibérément choisi de faire abstraction de tout ce côté too much de l’artiste et son choix se respecte. Mais du coup, on ne reconnaît pas vraiment Gainsbourg dans tout ça, et tous les épisodes marquants de sa vie (Bardot, la Marseillaise…) apparaissent comme des petites vignettes plaquées sur le reste. Donc, en définitive, le bilan est très mitigé : si l’on fait abstraction du personnage (mais le peut-on vraiment ?), c’est un film très original et intéressant. Et dans le cas contraire, on n’y trouve pas assez de l’âme ni de l’aspect hors-normes de Gainsbourg. Ca donne un film entre deux chaises, indéniablement séduisant et porté par la performance d’Eric Elmosnino, mais plombé par la stature de son sujet. Dommage.

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