Film de Jason Reitman (2014), avec Adam Sandler, Jennifer Garner, Rosemarie de Witt, Judy Greer, Dean Norris, etc…
Franchement, y'avait de la matière. Raconter les destinées croisées d'une poignée de personnages à travers leur rapport au numérique, au web et aux réseaux sociaux, c'était vraiment très très très ambitieux. Et attirant, aussi, pour ceux qui, comme nous au Strapontin, avaient apprécié la petite musique d'In The Air ou de Labor Day, les précédents films de Jason Reitman. Il y avait vraiment de quoi faire. Trop, même. A l'arrivée, Men, Women and Children est juste un bon film : là où on attendait un Magnolia de l'ère numérique, on se retrouve avec un spectacle agréable, qui n'évite malheureusement pas les lieux communs.
La faute à des personnages tellement stéréotypés qu'ils en deviennent de véritables caricatures. Entre le père de famille frustré qui mate du porno sur le web et trompe sa femme avec une escort girl, l'ado anorexique et la maniaque du contrôle, c'est bonjour les clichés et bienvenue aux idées reçues. On a vite compris que le web, c'est mal et que les réseaux soi-disant sociaux ne le sont pas vraiment. La vraie vie, c'est celle de ces deux ados choupinous qui vivent leur amour sans portable et dont la seule source de prise de tête vient justement d'Internet.
C'est dommage, car il y a quand même un beau film, caché sous ce monceau de stéréotypes, avec quelques belles idées, une méditation qui n’est pas inintéressante. Jason Reitman sait utiliser toutes les ressources de la techniques pour aboutir à une sorte d’interactivité visuelle, qui est très plaisante à l’œil. On y retrouve les effets utilisés dans Non Stop, avec l'esthétique web qui s'incruste dans les différentes scènes par le biais de petits pop-ups. C'était un petit challenge que de faire passer à l'écran l’interaction entre monde virtuel et réalité, et c'est fait d'une manière dynamique, qui n'encombre jamais le déroulé du film.
Ce qui le pénalise, par contre, ce sont plutôt ces personnages et situations taillés à l'emporte pièces, dont seuls les plus marquants ou les plus outranciers s'imposent réellement. Adam Sandler, à contre-emploi, est plutôt bon en mari frustré, mais son personnage n'est pas réellement creusé. Idem pour Jennifer Garner en mère de famille qui piste sa gamine. Tout au plus le film arrive-t-il à trouver une certaine justesse quand il dépeint avec une touche de désenchantement la misère sexuelle qui nait de ces rapports déshumanisés, mais c'est bien peu par rapport aux perspectives qu'ouvrait le film et qui restent sous-exploitées.
Pour finir, Men, Women and Children nous renvoie vers le cosmique et l'infini, juste histoire de montrer qu'en définitive, tout cela n'est que bien peu de chose par rapport à l'immensité de l'univers. En effet, vu l’étroitesse et le manque d’ampleur des différentes micro-intrigues, on peut dire ça. Le vrai challenge, cela aurait été de les rendre si passionnantes et essentielles qu'elles auraient effectivement fourni un contraste parfait avec cette fin démesurée. Parce qu’honnêtement, mettre en parallèle un mari insatisfait qui mate des boulards sur Internet et l’immensité du cosmos, ça le fait vraiment moyen. Une belle occasion ratée par un metteur en scène qu’on commençait à aimer. Dommage.
Le Générique
Même si l’idée de base ne sert pas vraiment le message du film de manière très efficace, elle est illustrée de manière très poétique dans le générique, qui montre le périple de la sonde Voyager II à travers le système solaire. Réalisée en images de synthèse, la séquence a été conçue par Gareth Smith et sa société, Smith & Lee, qui n’en sont pas à leur coup d’essai, puisqu’ils ont signé les génériques de tous les films de Jason Reitman, en particulier, celui, remarqué, de Juno.
L’Approche Visuelle
L’aspect le plus réussi du film, c’est l’intégration des graphismes web au sein même des différentes scènes. Le film Non Stop, avec Liam Neeson, avait expérimenté la techique avec bonheur (les mauvaises langues vous diront que c’était tout ce qu’il y avait de bon dans le film !), et Men, Women and Children la pousse un cran plus loin, puisqu’il s’agît de mettre l’accent sur l’omniprésence de cet univers virtuel. Un travail assez monumental, donc, même s’il repose sur de simples incrustations de graphismes web. C’est encore Gareth Smith qui s’y colle, avec Smith & Lee, mais aussi l’assistance de la boîte d’effets spéciaux Framestore.
Une bonne partie du succès de cette démarche, c’est aussi qu’elle utilise des visuels très familiers, mais qui se devaient de correspondre avec ceux que le public connait bien. D’après Jason Reitman, le réalisateur, tout cet arrière-plan virtuel a été aussi couteux à mettre en scène que les scènes “réelles”. Des licences ont donc été négociées avec Apple et Facebook (entre autres) pour l’utilisation de leurs différentes chartes graphiques. Le résultat est parfaitement crédible, et donc d’autant plus réussi. Si on peut reprocher bien des choses au film, on ne peut en tout cas pas nier l’originalité de son approche.
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