samedi 7 mars 2015

Night Call

(Nightcrawler)

Film de Dan Gilroy (2014), avec Jake Gyllenhall, Rene Russo, Bill Paxton, Riz Ahmed, Michael Hyatt, etc…

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En anglais, un nightcrawler, c'est un ver de terre, un asticot, bref un truc qui traine sur la pourriture (et par extension les cadavres) et s'en nourrit. Une description assez juste du personnage principal de cette curiosité, qui offre un regard très troublant sur la violence et son exploitation par les médias. 

 

vlcsnap-2015-03-06-18h50m34s57Ça commence un peu comme une success story lambda, avec Lou (Jake Gyllenhaal) un bon gars qui découvre un peu par hasard qu'il y a pas mal de fric à se faire en se baladant dans L.A. avec une caméra vidéo pour jouer les reporters freelance et ensuite proposer ses images aux chaines de télé. D'abord amateuriste, son activité va prendre son essor et le héros va vite être entrainé dans une course au sensationnel, allant de plus en plus loin pour livrer des images de plus en plus choquantes.

 


 

vlcsnap-2015-03-06-19h01m30s174Cela faisait bien longtemps que le cinéma U.S. ne nous avait pas livré un personnage aussi ouvertement abject, qui bafoue sans la moindre vergogne toutes les règles de la décence pour exploiter le plus crument possible la violence dans tout ce qu'elle a de spectaculaire. Jake Gyllenhaal lui prête son air lunaire façon Donnie Darko, et en fait un sociopathe à la fois familier et inquiétant, dont le discours est quasiment celui d’un chef d’entreprise, toujours prêt à vanter les mérites de l’investissement personnel et du challenge. C’est une performance aussi remarquable qu’elle est subtile, qui place déjà le spectateur sur un terrain peu familier, virant petit à petit vers le glauque.


 

vlcsnap-2015-03-06-18h56m02s45Night Call questionne naturellement notre rapport aux images et à la violence, mais également à la façon dont elles sont mises en scène. Arrivé sur les lieux d’un accident, la première réaction de Lou n’est pas de porter secours aux victimes, mais de déplacer les corps pour obtenir l’image la plus spectaculaire possible. De même, il est frappant de voir comment le reportage est utilisé par la chaine pour manipuler la paranoïa et faire naitre la peur chez le public  Le film ne fait pas que décrire un comportement aberrant, il détaille et encourage la réflexion sur l’utilisation des images, le tout sans virer dans le démonstratif ou le lourdingue.

 

vlcsnap-2015-03-06-19h06m53s126Au fur et à mesure de son déroulement, la charge contre les médias se fait de plus en plus vive, mais c’est par le biais d’une intrigue qui dérape constamment vers le malsain et d’un personnage qui ne semble avoir aucune limite sur le plan moral, encouragé dans son délire par une chaine de télévision prête à tout pour faire de l’audimat. On rit souvent jaune devant des excès qui, quelque part, se semblent pas si éloignés de la réalité, et c’est dans ce sens que le film fait froid dans le dos. Un sacré exploit quand on sait que c’est seulement le premier film de Dan Gilroy, un scénariste pas vraiment connu pour faire dans la finesse (Real Steel ou le dernier Jason Bourne… mouais).

 

 

Il y a tellement de films qui passent à côté de leur sujet que l’on ne peut qu’applaudir ce Night Call inhabituel et dérangeant, qui outre le fait d’offrir à Jake Gyllenhaal un rôle en or massif, sait aussi mettre le doigt sur plusieurs dérives de l’info. A la fois féroce, cynique et prenant, une magistrale réussite sur un sujet casse-gueule et pas gagné d’avance.

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