Film de Michael Bay (2006), avec Ewan Mc Gregor, Scarlett Johansson, Sean Bean, Steve Buscemi, Djimon Hounsou, etc…
Allez comprendre pourquoi, The Island, un des films le plus ambitieux de Michael Bay, s'est ramassé au box-office. Quand le réalisateur signe des blockbusters bas de plafond et dopés à la testostérone façon Transformers, c'est le carton garanti, mais dès qu’il tate à la S.F. ambitieuse, macache oualou. Pourtant, même s'il n'est pas exempt de défauts, le film aurait mérité un peu mieux que cet accueil plus que tiédasse, mais bon c'est comme ça, on n’y peut rien.
Bay, son truc, c'est de mettre des bonnes vieilles recettes au gout du jour, et tant pis pour la subtilité. Une esthétique de pub, une musique tchakapoum tonitruante, des plans archi-courts, montés sur un rythme ultra-speed. Et bien sûr les inévitables ingrédients du film d'action moderne: cascades de voiture irréalistes, explosions en pagaille et bande son Dolby à fond les manettes. Ca tombe bien, il y a tout ça dans The Island, mais comme dirait Jean Lefebvre dans Les Tontons Flingueurs “y’a aut’chose!”. De la science-fiction, donc, mais pas n’importe laquelle puisque le film compile ingénieusement plusieurs idées à priori disparates.
Ca commence façon THX 1138, avec une société idéale où tout le monde est habillé en blanc, porte des Puma (merci le placement de produit !) et joue à l’EuroMillions. Enfin presque : il y a une méga-loterie, où on gagne non pas des patates, mais un voyage sur une ile paradisiaque. Bien entendu, tout cela est trop beau pour être honnête, et notre héros Lincoln 6 Echo (Ewan Mc Gregor) va mener son enquête en compagnie de la belle Scarlett… pour découvrir que la vérité n’est pas franchement reluisante.
Je n’en raconterai pas plus histoire de ne pas éventer les surprises d’un scénario assez bien fichu, qui emprunte à différents genres plutôt hétéroclites, et qui tient à la fois de L’Age de Cristal, de Bienvenue à Gattaca, de Minority Report ou même de Coma. C’est de la S.F. bourrée d’idées, et qui se révèle beaucoup plus sombre que ce à quoi le sujet pourrait faire penser. Mais en même temps, ça garde un petit ton décalé, entre les clins d’œil sur les obsessions sécuritaires ou sanitaires du futur et le numéro de Steve Buscemi, comme toujours impeccable dans son rôle de machino rigolo.
Après ce début plus que prometteur, Michael Bay se lâche dans une seconde partie sur-saturée de poursuites en tout genre. On n’y va pas par quatre chemins : le film veut carrément exploser tout ce qui a pu se faire dans le genre, et franchement le réalisateur met le paquet. J’en veux pour preuve une ébouriffante séquence sur autoroute où les gentils balancent carrément des essieux de train (vous avez bien lu !) sur les bagnoles des méchants, avec les résultats désastreux que vous pouvez imaginer. C’est un festival de tôle froissée et de cascades bluffantes et en soi un petit régal.
Ce qui est bien dommage, c’est qu’après cet intermède plutôt bidonnant, Bay se croit obligé d’en faire toujours plus. Tout ce beau monde se course en moto volante, à pied ou en voiture, tout en se payant au passage une chute libre accroché à l’enseigne d’un building, rien que ça ! Cette surenchère dans le too much devient très vite saoulante, encore que le réalisateur a le bon goût de lui conserver une certaine lisibilité sur le plan visuel : pas de caméra shaker ou de cadrages parkinsoniens ici. Les effets sont bluffants, mais tout cela est bien vain et ne fait pas beaucoup avancer le schmilblick.
Résultat, le réalisateur dilue inutilement un concept qu’il avait pourtant plutôt bien posé dans la première partie. Cela crée un déséquilibre, et du coup la conclusion, pourtant dans la logique du reste, semble artificielle et convenue. En embrayant sur l’action à tout va, Michael Bay bousille tout ce que son idée de base pouvait avoir de réaliste ou d’effrayant et nivelle par le bas un sujet qui méritait bien mieux. Dommage pour ceux qui attendaient un grand film de S.F. ou une réflexion sur les perspectives passionnantes offertes par le scénario. Ils se retrouvent avec une moitié de thriller boostée aux stéroïdes, ce qui est ma foi plutôt sympathique mais qui aurait pu aller beaucoup, beaucoup plus loin.
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