lundi 9 février 2015

Chromosome 3

(The Brood)

Film de David Cronenberg (1981), avec Oliver Reed, Samantha Eggar, Art Hindle, Nuale Fitzgerald, Garry Mc Keehan, etc…

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Même si c'est avec Scanners que David Cronenberg accèdera à la célébrité, c'est indéniablement The Brood (oubliez le titre français débile) qui posera les bases de son style. Difficile de faire plus dérangeant que ce petit film qui, au delà de ses attributs de film d'horreur, s'avère surtout être une cruelle méditation sur le divorce.


vlcsnap-2015-02-07-18h13m05s76Il est souvent question de fausses pistes dans The Brood, et ce dès le départ. La première scène nous montre deux hommes l'un face à l'autre, en train de se déchirer. Pièce de théâtre ? Thérapie comportementale ? Jeu de rôle ? Dès le début, on est déstabilisé par une intrigue et une approche de la mise en scène inhabituelles. Cronenberg nous livre des indices au fur et à mesure que la scène progresse, puis il nous donne les clés pour décoder la séquence, mais alors la scène dérape vers quelque chose d'autre, une autre dimension dans laquelle il est question de mutations, de rage intérieure.





vlcsnap-2015-02-07-18h31m18s9En quelques séquences dépouillées, Cronenberg pose les bases de son univers, mais il le fait au sein d'une histoire aux profondes résonances humaines. Un père divorcé avec sa fille. Une série de meurtres crapuleux. Un mystère autour des activités d'un psychanalyste reconnu... Tout cela est décrit avec un profond dépouillement et avec une grande économie de moyens, dans un style très sobre. En même temps, Cronenberg n'oublie pas ses racines, ces petits films d'horreur qui l'ont propulsé sur le devant de la scène. Deux ou trois scènes très violentes servent de contrepoint, mais réalisées dans un style sec et sans concessions.

 

 

 

vlcsnap-2015-02-08-18h39m46s223Tout le génie du réalisateur, c’est d’avoir intégré sa propre expérience, celle d’un divorce particulièrement douloureux, pour nourrir un scénario qui dérive lentement vers le fantastique. Les sentiments négatifs tels que la haine ou la colère deviennent les vecteurs d’une mutation et donnent naissance à des monstres. On pense à un classique comme Planète Interdite dans lequel l’esprit prenait le pas sur l’individu. A ceci près que l’approche de Cronenberg est très organique. A l’aide d’effets de maquillage minimalistes, mais placés stratégiquement, il crée un profond malaise, celui lié à une révolte du corps, qui devient alors une entité incontrôlable.

 

 

 

vlcsnap-2015-02-07-18h32m12s16Alors que les premiers films du réalisateur présentaient des faiblesses au niveau de l’interprétation, et s’il est vrai que le jeu d’Art Hindle est parfois un peu juste, The Brood se signale par les excellentes performances de ses deux vedettes, Oliver Reed et Samantha Eggar. Reed apporte au film son imposante stature et la puissance de son jeu, qui colle parfaitement au personnage de Raglan, une sorte de gourou aux intentions mystérieuses. Quant à Samantha Eggar, qui personnellement ne m’avait jamais convaincue, elle se révèle être vraiment formidable dans un rôle difficile et antipathique. C’est grâce à elle que le concept de Cronenberg tient la route et ses échanges avec Oliver Reed sont des moments de formidable intensité.

 

 

Sous ses allures de petit film, The Brood est pourtant une pièce indispensable dans la thématique du réalisateur. Déconcertant dans son mélange d’horreur, de tension psychologique et de fantastique, le film est porté par deux énormes performances d’acteurs. Partant d’un postulat très réaliste, il y intègre petit à petit les idées les plus tordues pour emmener le spectateur vers une conclusion à la fois bluffante et culotée. S’il ne va pas aussi loin que dans certains de ses chefs d’œuvre, Cronenberg y affirme en tout cas son style de manière discrète mais impitoyablement efficace.

 

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